• La terrible humiliation des femmes tondues

     

    Publié le 26/08/2001

    Tarn - TARN : Après la Libération d'Albi, le 26 août 1944

    La terrible humiliation des femmes tondues - DDM 

      La terrible humiliation des femmes tondues DDM

    Comme le précise la légende au dos d'une des photos d'époque, c'était à « Albi, samedi 26 août 1944 à 19 heures.

     

    Les femmes ayant pratiqué la collaboration horizontale sont tondues sur le Vigan. »

     

    Sur les photos, on voit ces femmes, mises à genoux comme en signe d'expiation.

    Au nombre de neuf sur les photos, la plupart sont jeunes, parfois belles.

     

    Deux hommes, l'un avec une blouse blanche de coiffeur, l'autre vêtu d'une sorte d'uniforme, leur rasent les cheveux aux ciseaux.

     

    L'une, déjà tondue, sa chevelure éparpillée autour d'elle, échange un regard avec une autre, qui y passe.

    Sur une autre image, prise quelques minutes auparavant, on aperçoit la même debout, bras croisés, attendant son tour.

    C'est une jolie brune coiffée avec art, avec une robe blanche qui lui arrive aux genoux.

    Une autre, vêtue de sombre, aux cheveux tirés en arrière avec une raie au milieu, passe sa main gauche sur le visage, comme pour écraser une larme.

    Tout autour, la foule. Surtout des hommes jeunes.

     

    Beaucoup arborent un béret sur la tête et la cigarette

    ou la pipe au bec.

      Rigolards, ils ont l'air de s'amuser beaucoup.

    Quelques uns ont un fusil.

      

    A l'arrière- plan, quatre individus sont montés sur quelque chose pour mieux profiter du spectacle.

    Cette scène, dont le 26 août 2001 marque le 57e anniversaire, Yves Bénazech, 89 ans, est un des derniers témoins à pouvoir la raconter.

     

    L'auteur du livre « Les Terroristes de l'Espérance », chronique du Tarn sous la Résistance, le fait volontiers, pour l'Histoire.

    C'est important pour les générations futures d'expliquer ce qui s'est passé, sur cet épisode peu glorieux de la Libération, comme sur d'autres qui le furent davantage. La tonte des femmes a marqué les esprits. Il faut dire ce qu'il en fut réellement.

    « Déchainements »

    Cet événement sinistre s'est inscrit dans les journées troublées qui ont suivi la Libération d'Albi le 19 août 1944. Avec la liberté retrouvée, relate Yves Bénazech, « tous les déchainements ont été rendus possibles.

      

    Pendant 15 jours à trois semaines, ce fut la pagaïe.

    C'était fou. N'importe qui faisait n'importe quoi.

    C'était avant que les autorités soient remises en place, avec la nomination d'un préfet, des consignes précises données aux policiers et l'aide des chefs de maquis, qui ont participé à remettre de l'ordre.

     

    Au début, il sortait des gens avec des galons de partout, que l'on surnommait les naphtalinards.

     

    Des types qui n'avaient rien foutu pendant la Résistance

    ont sorti l'uniforme.

     

     

     

    Avant la Libération, on était 2.500 au maquis.

    Cinq ou six jours après, on était 10.000 environ.

     

    Des gens que l'on n'avait jamais vus jusque là sont apparus.

     

    Tout un tas de gens qui s'étaient compromis se sont dépêchés

    de se mettre en avant à la Libération. »

     

    Les femmes tondues ne furent pas les seules victimes de ces exactions.

     

    « Il y a eu des gens tués, on se demande pourquoi.

     

    Parfois par jalousie ou par vengeance.

    Pour leur prendre leur femme...

     

     

    C'est facile quand on a une arme à la main, si on n'est pas bien équilibré. »

    Yves Bénazech met la tonte des femmes sur le compte de ces éléments incontrôlés. Il ne nie pas que des vrais résistants aient pu figurer dans la foule du Vigan:

     

    « Certains en étaient capables.

     

    Mais ce n'était pas des ordres donnés par la Résistance.

     

    C'était des actes individuels.

     

    Des individus sont allés ramasser des femmes, celles dont ils considéraient qu'elles allaient avec les Allemands.

      

    Certaines couchaient avec des officiers.

     

    Mais il y en avait certainement d'autres qui n'avaient rien fait.

     

    Ils sont allés les chercher chez elles.

     

    Ils en ont pris d'autres au Bon-Sauveur, parmi les internées. »

     

    Yves Bénazech en connaissait quelques unes de vue, mais ne leur avait jamais parlé.

      

    Ce jeune policier était entré au commissariat d'Albi en 1942.

    En tant qu'agent,

    il participait à des gardes devant les bâtiments allemands, comme la feld-gendarmerie, rue Séré-de- Rivières.

      

    « Le soir, on voyait ces femmes entrer... »

      

    Les femmes tondues « n'étaient pas des prostituées.

     

    C'étaient des femmes libres qui s'étaient mêlées aux Allemands.

    Les prostituées n'ont pas été inquiétées.

     

    De leur part, on considérait que c'était normal.

    Elles étaient dans des bordels.

    Il y en avait un derrière le marché couvert, rue Athon, il me semble », se souvient Yves Bénazech.

    Le soir du 26 août 1944, la place était noire de monde « comme tous les jours. Il se passait sans cesse des choses » dans l'effervescence de la Libération.

    « Le coiffeur du coin avait été réquisitionné.

    On lui avait demandé de couper les cheveux aux femmes. »

    Ensuite, leurs tourmenteurs leur avaient peint une croix-gammée sur le crâne nu et les avaient faites poser, à genoux, alignées l'une à côté de l'autre.

    Yves Bénazech parle d'un accès « de bestialité ». Il est très dur envers ses auteurs. « C'est désastreux ce qu'ils ont fait.

    Ils adoptaient les méthodes des nazis. Si on recommence à faire ce que les Allemands faisaient, ça ne va plus. On ne s'était pas battus pour ça », dit cet ancien résistant. « Tondre les femmes, c'est une drôle d'humiliation.

    La dignité humaine ne comptait plus. »

    A l'époque, Yves Bénazech était de retour au commissariat après son passage dans le maquis.

    Alors âgé de 30 ans, il était chargé de récupérer du matériel et des gens présumés coupables.

     

    Quelqu'un, dans la foule qui assistait à la tonte des femmes, l'avait prévenu ainsi que Charles d'Aragon, le vice- président du Comité départemental de la Libération (CDL). Ils sont intervenus pour arrêter ça.

    « D'Aragon avait l'autorité pour le faire. Il a pris les ciseaux du coiffeur.

     

    Il a gueulé. Il a dit que c'était indigne. Il leur a fait lâcher les femmes.

    On les a libérées et on les a renvoyées sans les embêter. La foule s'est dispersée. »

    Ceux qui les avaient tondues n'ont pas été poursuivis.

     

    « Elles ont marché avec les boches. On les tond »,

    déclaraient-ils. « Ils trouvaient ça normal. »

    Yves Bénazech pense « qu'il y a dû avoir des larmes »

    chez leurs victimes même s'il n'en a pas vu.

     

    « A Toulouse, ils les avaient fait défiler nues.

    Il y en a une qui s'est suicidée après. »

     

     

    Plus tard, Yves Bénazech a croisé une ou deux de ces femmes dans les rues d'Albi. Il ne sait pas ce qu'elles sont devenues.

     

    Alain-Marc DELBOUYS.

     

     


    André, 74 ans:

    « Ce n'était pas très glorieux »

    «Je passais. Je n'ai pas participé ni rien. Je l'ai vu », confie André, 74 ans, de Saint- Juéry.

     

    Agé alors de 17 ans, il a assisté à l'épisode des femmes tondues sur le Vigan le 26 août 1944.

     

    La place d'Albi était « toujours pleine les premiers temps après la Libération. Il y avait tellement de monde » que le jeune homme d'alors n'a eu qu'une vision partielle de la scène.

     

     

    Mais il assure que « ce ne sont pas des militaires qui ont fait ça. Il n'y en avait aucun. C'était des civils.

     

    Les filles étaient jeunes.

    Elles avaient 25 ans au maximum, même moins. L'ambiance était assez difficile à décrire. Cela a été fait de manière sauvage. »

     

     

    André l'interprète comme « une ruée », dans laquelle ces filles se sont trouvées prises. « Ce sont certainement des vengeances de voisinage, émanant peut-être de gens qui auraient voulu se payer ces filles. Je ne pense pas que c'était des filles de haute moralité. Ce n'étaient pas des prostituées, plutôt des filles "faciles" »

    « HONTE POUR EUX »

    Selon André, elles étaient plus de neuf, plutôt une quinzaine. « Sur les photos, elles n'y étaient pas toutes. Cela s'est peut-être fait en plusieurs endroits. »

    Il se souvient en effet d'avoir ensuite, en tant que militaire, avoir gardé des femmes tondues à l'hôpital, « pour les protéger et pour les empêcher de partir ».

     

    Cinquante sept ans plus tard, André estime qu'il n'est « pas là pour juger. Mais ce n'est pas très glorieux pour ceux qui ont tondu ces femmes.

     

     

    Les Albigeois ont leur mea culpa à faire.

     

    Plus tard, cela s'est reproduit sur l'île d'Oléron sur des jeunes filles.

    C'était des soldats de mon groupe qui l'avaient fait. J'avais honte pour eux. Après, je suis allé m'excuser auprès des parents. Nous étions des

    libérateurs, pas des justiciers. » A.-M. D.

     

     


    Robert, 80 ans: « Elles allaient avec l'ennemi »

    Robert Ruffel, 80 ans, de Saint-Juéry, n'était pas sur le Vigan le 26 juin 1944. Mais il connaissait une des filles tondues à la Libération.

    « Elle habitait rue de la Rivière à Albi. Elle avait 20 ou 25 ans.

    On se tutoyait. Pendant l'Occupation, elle se baladait avec un Allemand. » Après la Libération, pour masquer sa chevelure perdue, la jeune femme « portait un foulard, comme toutes ».

    Il n'en a jamais parlé avec elle, mais Robert Ruffel pense que « ça a été terrible » pour cette fille « connue dans Albi. Ce n'était pas une prostituée. C'était une fille sérieuse. Et puis il a fallu cette saleté de guerre...

    Après qu'elle ait été tondue, ça été fini. Elle était devenue très maigre.

    Elle est morte peut-être une dizaine d'années après. »

     

    Il suppose que c'était « de chagrin ».

     

     

    Pourtant, l'octogénaire n'est pas tendre envers ces femmes qui « faisaient » avec les Allemands, avec qui elles « se promenaient bras dessus, bras dessous.

    Elles s'affichaient avec l'ennemi.

    Je dis que ceux qui les ont tondues ont bien fait. »

    « Leur table était garnie... »

    « Ce n'était pas normal d'aller avec les Allemands, ajoute Evelyne Ruffel, l'épouse de Robert.

    Elles, elles avaient tout ce qu'elles voulaient, et nous, on crevait de faim.

     

    Quand on n'avait plus de pain, elles avaient tout ce qu'il fallait sur la table.

    En plus, nos maris risquaient leur vie.

    -Au STO, où j'ai passé trois mois, on s'est retrouvé un jour avec un pétard sur le ventre, simplement parce qu'on s'abritait de la pluie.

    Ça ne fait pas plaisir », fait valoir Robert.

    « Et ceux qui ont été torturés?

    C'est pire que de se faire couper les cheveux.

    Si on m'avait donné à choisir, j'aurais dit: Rasez-moi la tête! »

      

    Peut-être que la femme qu'il connaissait agissait par amour?

      

    « Ne dites pas n'importe quoi », dit Robert, pour qui elle était plutôt motivée

    « par la faim ».

    A.-M. D.

     

    SOURCES

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  • Les "Tondues" de la Libération

     

    Cette pratique fut tristement et pourtant massivement répandue sur l'ensemble du territoire français de 1943 à 1946.




    Si le la vidéo ne s'affiche pas cliquer ICI
    (Video au format MP4)

    La Libération de la France a été une période complexe où se mêlèrent joie et enthousiasme pour certains mais aussi crainte et tristesse pour d'autres.

    Pour cimenter cette joie collective, un exutoire commun permet d'exprimer ces retrouvailles : s'en prendre aux collaborateurs, aux prisonniers allemands, à tous ceux qui ont eu des comportements jugés indignes.
     

    Parmi ceux-là, les femmes qui ont eu des relations affectives avec des soldats allemands seront tondues dans le meilleur des cas...
     
     
    Pour la plupart d'entre elles, c'est presque toujours la même histoire, celle d'une France occupée dans laquelle des jeunes filles, par insouciance ou inconscience, franchissent les interdits et commettent l'impensable : le délit d'adultère avec l'ennemi de la Nation.



    La France sera "virile ou morte". C'est à partir de cette phrase que l'historien Fabrice Virgili fonde son étude sur les tontes des femmes entre 1943 et 1946.



    Dans sa thèse, Fabrice Virgili, recense le nombre de tontes et leur périodicité.
    20 000 femmes furent tondues entre 1943 et 1946, mais seulement la moitié fut accusée de "collaboration horizontale".

    Un tiers pour les femmes détenues, c'est à dire ayant eu des relations sexuelles avérées ou non avec l'ennemi.

    Les femmes tondues sont les femmes qui ont subi, à l'issue ou lors d'un conflit majeur, diverses humiliations, dont la tonte de leur chevelure, de la part de compatriotes indignés de leur comportement, généralement des relations intimes volontaires avec les soldats ennemis.

    La nature de cette accusation constitue un premier clivage entre les sexes, relatif quand les accusations de dénonciation, de collaboration économique ou politique touchent femmes et hommes de manière similaire, marqué pour les accusations de relations sexuelles uniquement reprochées aux femmes.

    Le caractère sexué de la collaboration relève un discours spécifique qui reflète l'image d'une femme incapable d'agir de sa propre initiative.

    Soit qu'elle suive l'homme avec qui elle partage sa vie (les femmes de collaborateurs sont autant condamnées que leurs maris), soit qu'elle se conforme à une nature jugée insouciante, irresponsable, cupide ou immorale.

    Ce sont les explications avancées par certains tribunaux pour expliquer les actes des collaboratrices.

    Les "faiblesses du sexe faible" participent à la représentation des collaboratrices.

    La tonte est une sanction de faits sans gravité. Les relations sexuelles avec les Allemands n'influent en rien sur le cours des événements.

    C'est un acte symbolique de rupture avec l'ennemi qui produit sa propre image.

    Elle devient peu à peu le châtiment unique et exclusif des relations avec les Allemands et la marque provisoire d'une culpabilité sexuelle.
    La coupe de cheveux n'est pas le châtiment d'une collaboration sexuelle mais le châtiment sexué d'une collaboration.




    La tonte s'apparente à une faiblesse. Quelques hommes ont également été tondus (dans sept départements au moins), mais pour des motifs différents : pour manque de courage ou de virilité, pillage, travail volontaire pour les Allemands, collaboration mais aucune référence sexuelle n'apparaît à leur encontre.

    La tonte, les assimilant à des femmes, est une humiliation supplémentaire, dévirilisante, et ne revêt pas le caractère sexualisé des tontes de femmes.

    La tonte s'inscrit dans une geste guerrière. Le terme de tondue reste systématiquement et seulement féminin.

    Un phénomène massif.

    Que savons nous aujourd'hui sur les tontes ?

    L'état actuel de la recherche ne nous permet pas de chiffrer précisément ce phénomène. Il n'en demeure pas moins qu'il fut massif. Il concerne toutes les régions de France.

    Même dans l'Est de la France, que l'on croyait épargné, il y eut "des femmes aux cheveux coupés", c'est le cas par exemple à Rambervilliers où des manifestants installent dans un café un "bureau de tonte", devant lequel passent douze femmes, travailleuses volontaires en Allemagne ou collaboratrices, les 31 mai et 1er juin 1945.

    Les tontes se déroulent autant dans les grandes villes, qui ont toutes "leurs tondues", qu'en zone rurale.

    En Charente Inférieure, ce sont les gamins d'un petit village qui à l'exemple de leurs aînés "jouent au maquis... Armés de sabres de bois ils s'emparent du verger, pénètrent au poulailler et libèrent les lapins... Puis tondent trois petites filles".

    Plus généralement, les procès verbaux de Gendarmerie offrent, quand ils existent, de nombreux exemples de tontes se déroulant dans des villages, la promenade qui accompagne souvent la tonte s'étend alors d'un hameau à l'autre. Ces mentions sont trop nombreuses pour n'être que le fruit du hasard, on en retrouve pour l'instant dans soixante-dix-sept départements.

    C'est bien l'importance de cette pratique qui explique la "postérité" des tontes.

    On imagine aussi trop souvent les tontes comme accompagnant les seules journées de la Libération. Elles commencent en réalité plusieurs mois auparavant et ont été annoncées par certains organes de la presse clandestine.

    Dès mars 1944, on trouve des mentions concernant des départements aussi éloignés que la Loire Inférieure et l'Isère. Elles se déroulent alors de manière discrète, le plus souvent de nuit lors d'opérations visant des collaborateurs.

    Une fois les cortèges de tondues de la Libération passés, cette pratique se poursuit inégalement selon les lieux, sans que l'on sache encore très bien pourquoi elle perdure dans certaines villes. Ainsi, au sujet de quatre ou cinq femmes tondues fin septembre à Tournon, le journal local des FTP signale "qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire".

    Dans une petite ville de l'Oise, c'est une affiche intitulée "Liste des femmes dites Poules à Boches, n'ayant pas eu les cheveux coupés" qui tente de relancer les tontes début octobre 1944.


    Groupe de femmes tondues, photographiées devant l’entrée principale
    du Palais de Justice de Bergerac, septembre 1944

    L'historien Fabrice Virgili replace les tontes dans le temps.

    Pratiques empiriques, non marquées par une seule date, elles s'inscrivent dans un espace dont l'occupation a varié de 2 à 5 ans.

    Quand et où ont lieu les tontes ?

    Les premières menaces de tontes apparaissent dans la presse clandestine dès juillet 1941.

    Les premières tontes apparaissent dès 1943 entre mars et juin, quand la collaboration s'identifie de plus en plus à la trahison et ce dans quelques départements (Loire-Inférieure, Isère, Ille-et-Vilaine), mais sont clandestines et ne sont pas nombreuses.

    Elles sont le fait de groupes résistants qui l'utilisent comme moyen pour faire passer la peur dans l'autre camp. C'est pourquoi les tontes de la Libération ne surprennent pas. Elles sont rentrées dans les moeurs.

    Une première vague a lieu entre juin et septembre 1944 au fur et à mesure de la libération du territoire.
    Les tontes marquent la libération de plus petites parcelles du territoire souillé par la présence allemande.

    La recherche des femmes à tondre a lieu dès l’installation des comités locaux de Libération (CLL), et fait partie de leurs premières tâches, alors que les troupes allemandes peuvent se trouver à proximité. La première vague importante a donc lieu à la fin de l’été 1944.

    Ces tontes sont relayées et décrites par la presse, et Radio-Londres (émissions des 20 et 30 août 1944). Des résurgences ont lieu durant l’automne, et des tontes se produisent sporadiquement tout l’hiver.

    La maison de la "Tondue" qu'on investit et qu'on marque même avec ce qui reste de cheveux, ou la réappropriation des lieux publics et de pouvoir. La tonte s'effectue dans les rues, les places ou dans les mairies. Généralement en public aux yeux de tous.




    Groupe de femmes tondues, photographiées devant l’entrée principale
    du Palais de Justice de Bergerac, septembre 1944

    Une deuxième vague importante, en revanche, se dessine nettement entre mai et juillet 1945, lors de la capitulation allemande (et ce, malgré une condamnation de cette pratique dans l'opinion publique dès octobre 1944).

    Elle correspond à la conjonction de trois phénomènes.

    C'est la période du retour des déportés, des prisonniers de guerre, des requis au STO (ces derniers participent aux tontes de celles qui avaient suivi les Allemands dans leur défaite ou des femmes de prisonniers). Mais aussi des travailleurs volontaires et de celles et ceux qui sont partis avec les Allemands lors de leur retraite.

    Ces femmes qui reviennent d’Allemagne sont tondues, souvent sur le quai de la gare. Des femmes qui avaient échappé à la première vague, ou qui sont libérées après une peine jugée trop légère, souvent au printemps 45, sont également "Tondues". La dernière tonte recensée a lieu en Savoie en février 19469. Ces tontes se poursuivent jusqu’à la fin de 1945 (les retours ont lieu jusqu’à l’automne).

    C'est aussi la découverte de l'horreur des camps. Retour des rescapés, images des camps, témoignages publiés par la presse provoquent un véritable choc dans la population.

    La volonté d'une épuration en profondeur est ainsi relancée.

    C'est aussi le moment où un certain nombre de personnes, arrêtées à la Libération, sont relâchées après quelques mois d'internement. Pour beaucoup, elles semblent s'en tirer à trop bon compte. Tontes, attentats, exécutions viennent compléter une épuration légale jugée trop clémente ou incomplète par certains.



    Le Préfet du Jura note dans son rapport bimensuel.

    "C'est la première fois depuis de très nombreux mois, et dans différents centres du département, on s'est emparé de certaines femmes pour leur couper les cheveux; on s'en prend aussi bien à des femmes de mœurs légères, qu'à d'autres personnes de conditions sociales plus élevées, qui s'étaient fait remarquer pendant l'Occupation".

    On assiste ainsi à ce que l'on pourrait qualifier "d'épuration extra-judiciaire rampante" jusqu'à la fin 1945, voire le début de l'année 1946.

    Le prolongement des tontes dans le temps ainsi que leur extension sur l'ensemble du territoire expliquent la grande variété de leur déroulement.

    Beaucoup en effet ne correspondent pas à l'image qui demeure aujourd'hui. La tonte ne se déroule pas toujours devant une foule en liesse ou en furie, elle n'est pas seulement l'œuvre de résistants de la dernière heure, elle ne châtie pas uniquement les relations sexuelles avec l'occupant, et n'est pas toujours un moyen de canaliser la violence vers le lampiste aux dépens des collaborateurs plus importants.


    Souvenir appartenant à un ancien patriote de Brest
    Mèches de cheveux coupées après la libération de Brest le 24 septembre 1944

    Et pourtant c'est bien cette image que la mémoire a conservée ou, pourrions-nous dire, a créée. Les photographies des tontes, fréquemment publiées mais somme toute peu nombreuses, les romans et quelques récits de témoins sont la partie émergée de cette histoire.

    Est mis en avant le châtiment : la coupe des cheveux, qui prend le dessus sur le délit. La lecture du châtiment suffit alors à caractériser "la Tondue", elle est punie dans son corps, c'est donc son corps qui est coupable.

    La destruction d'un des attributs de la séduction (la chevelure) implique ce que les contemporains appellent la "collaboration horizontale".




    Les principales intéressées se sont tues et se taisent encore de nos jours. Très peu parle. Il n'est pas facile de recueuillir des témoignages de "Tondues".

    Les historiens ne se sont pas arrêtés, au-delà de quelques lignes, à ce qui apparaissait peut-être trop comme une anecdote, un épiphénomène, un "décor" de la Libération. D'où l'importance de la mise en perspective de cette image de la tondue avec les sources aujourd'hui étudiées.

    Ces sources, en fonction de leur origine, offrent une vision partielle et partiale de la tonte. Les mises en scène du corps de la tondue qu'elles décrivent peuvent être résumées à trois fonctions distinctes. Ce corps est, successivement ou simultanément selon les cas, image de la faute, image de châtiment et, ce qui n'est pas le moindre des paradoxes, image positive d'une reconstruction.

    Les tontes s'imposent comme un événement à part entière, imbriqué dans un contexte général mais ayant sa propre dynamique.

    Ce n'est donc pas un simple aspect des journées libératrices ou une simple manifestation spontanée ; il relève des moments de fracture ou de consensus de la communauté nationale.

    Dans les documents étudiés, la faute, ou le crime imputé à "la Tondue" occupe souvent une place plus importante que la coupe des cheveux elle-même.

    Le traumatisme de l'occupation, les restrictions, les peurs, la faim et toutes les frustrations de la période, semblent alors exploser dans la description de celles qui seraient passées au travers de ces privations. "La vie de noces" supposée de ces femmes apparaît comme une injure aux souffrances du plus grand nombre.

    Les reproches invoqués peuvent alors toucher chaque aspect de la vie quotidienne. Ce sont des meubles et un poste de TSF que l'on reproche à une infirmière de Rochefort sur Mer d'avoir obtenu d'un Allemand, comme d'être raccompagnée en voiture, de pouvoir rentrer après l'heure du couvre-feu, de consommer du vin et des liqueurs, d'écouter de la musique et de danser alors que les bals sont interdits, de confectionner des gâteaux pour toutes les autres... La liste de ces griefs est longue.

    Si l'on a ainsi une image en négatif des frustrations de la population, ce qui exprime le plus ce reproche d'une vie de jouissance dans une période de souffrance est bien sûr l'accusation "d'avoir couché avec les boches".

    Il y a ainsi, par le vocabulaire de désignation de ces femmes, par la description plus ou moins fantasmée de leurs relations avec les Allemands, la construction d'une image érotisée des "Tondues".

    C'est probablement un des éléments qui fait encore croire que la tonte est le châtiment exclusif de ces relations sexuelles avec l'ennemi.

    Les articles de presse, malgré la violence de certains propos tels que "paillasse à boches", restent dans l'ensemble relativement pudiques. Le vocabulaire est plus feutré, moins directement vulgaire ; ainsi le terme le plus fréquemment utilisé est celui de prostituée, accompagné parfois de variations sur le même thème, telles que "égéries à doryphores", "cocodettes frivoles", "hétaïres de haute volée" ou celles qui ont "fridolinisé sur les matelas".


    Photo Robert Capa
    Femme tondue pour avoir eu un enfant d’un soldat allemand
    Chartres, 18 août 1944

    On imagine cependant mal une foule utilisant ces expressions à l'encontre d'un cortège de femmes tondues.

    Ces expressions "journalistiques" reflètent néanmoins, en les déformant, les sentiments exprimés de manière beaucoup plus directe lors des témoignages recueillis par les gendarmes.

    On a alors toute une palette de cette rancœur, souvent investie de fantasmes à l'encontre de celles qui sont soupçonnées d'avoir pratiqué "la collaboration horizontale".

    L'extrait ci-dessous d'un procès-verbal de gendarmerie montre très clairement la place de la rumeur dans le processus d'accusation d'une femme.

    Enquête suite à lettre anonyme dénonçant un avortement de Mme X, 25 ans, ménagère, mari prisonnier de guerre, internée.

    Témoin n° 1 "...elle est réputée comme étant de mœurs légères et a beaucoup fréquenté les Allemands..."

    Témoin n° 2 "...cependant à en croire la rumeur publique elle aurait fait un avortement. Il est notoire qu'elle a beaucoup fréquenté les Allemands et qu'elle a été bien critiquée à ce sujet..."

    Témoin n° 3 "...tout ce que je puis dire c'est qu'elle a fréquenté les troupes occupantes..."

    Témoin n° 4 "...la rumeur publique lui reproche d'avoir collaboré intimement avec les troupes d'occupation..."

    Témoin n° 5 "...à en croire la rumeur publique elle passait pour être enceinte...".

    Mme X "...je nie énergiquement les faits qui me sont reprochés..."

    Ne pas savoir si cette femme a été tondue, ni si les faits reprochés sont exacts, n'a que peu d'importance dans ce cas.

    On note que la multitude des témoignages à charge n'apporte, ici, pas plus de faits tangibles, ils jouent tous sur un même registre : celui de la réputation de cette femme.

    Nombreux sont ceux qui ignorent encore l'horreur des camps, les rafles et persécutions de tout ordre, mais beaucoup semblent tout connaître des pratiques sexuelles de l'occupant avec les "filles du pays".

    La "rumeur publique" permet de condamner les mœurs par trop légères de ces femmes. Elle a aussi pour fonction de pénétrer les lieux clos, comme le domicile de ces deux Grenobloises où se déroulaient "des noces crapuleuses dont les échos retentissaient dans tout le quartier".

    L'observation des allées et venues, l'écoute des bruits d'orgie ou plus simplement de musique, les scènes furtives volées au travers d'une persienne, d'une porte, deviennent ainsi un véritable récit construit sur le réel, l'imaginaire et le fantasme. Il permet au public de faire irruption dans le privé pour une narration de cette vie de débaucheé. La rumeur s'enrichit ainsi de multiples images de la jouissance.







     
     curieusement, ce sont toujours les mêmes images qui me viennent à l’esprit. Les scènes de liesse populaire, les défilés de résistants paradant dans les rues des villes et des villages libérés, les cérémonies patriotiques, les drapeaux suspendus dans les rues, les bals et les flonflons sur les places publiques… les tontes des “collaboratrices”.


    Ce qui leur valut de subir ce cérémonial avilissant… sans parler de toutes celles qui furent "Tondues" pour des crimes qu’elles n’avaient pas commis, sur dénonciation, “pour l’exemple”…
      
      
     



     
      
    Vouées à la vindicte publique et humiliées, exhibées sous les quolibets et les crachats de la foule, ces femmes “épurées” n’ont souvent rien compris du déferlement de violence dont elles ont fait l’objet.

    Elles furent le plus souvent les victimes expiatoires de quatre années d’Occupation.

     
    Le rituel du spectacle expiatoire a ses constantes.
      
      
    Cortèges bruyants de femmes et surtout d'hommes promenant à travers villages, bourgs ou villes des femmes portant sur le front, sur la poitrine, voire sur d'autres parties du corps, tracées au goudron ou à la peinture, des croix gammées et des inscriptions explicites: "a dénoncé", "Collabo", et plus souvent encore "a couché avec les boches".

    Les victimes étaient presque toujours à demi, parfois totalement dévêtues.
      
      
      
      
      
    Certaines portaient dans les bras leur enfant.
      
      
    Si elles n'avaient pas été immédiatement tondues, elles l'étaient de façon solennelle, sur une estrade placée devant un bâtiment public, et elles restaient ensuite exposées, comme jadis au pilori.




     
      
    Cette "coiffure 1944" était infligée à des femmes considérées soit comme des délatrices, soit comme des "collaboratrices à l'horizontale".
      
      
    Il a été couramment admis, mais trop vite, que ces dernières étaient en majorité des prostituées, ce qui permettait de supposer que les Françaises (en exceptant Arletty ou Coco Channel, qui avaient pu s'afficher avec un officier allemand), avaient été vraiment peu nombreuses à succomber au charme de l'occupant.
     
     




     
      
    On affirme volontiers que les explosions de haine à leur encontre ont été brèves et localisées, et qu'elles étaient menées par des résistants de la onzième heure à qui ce zèle purificateur permettait d'acquérir à bon compte une conduite patriotique.

    En fait, malgré les instructions officielles, des femmes continuèrent d'être tondues jusqu'a la fin de l'hiver 1944 1945. Et ce furent assez souvent des chefs des maquis ou les responsables des Comités de Libération qui patronnèrent ces cérémonies expiatoires.

    Ces comportements représentent une sorte de défoulement, après la tension insupportable des semaines qui ont précédé la Libération, ils témoignent de l'exaspération de ceux qui avaient vécu quatre années d'humiliation, qui venaient de subir les ultimes exactions de l'occupant et de ses complices français.

    Ce qui explique que la virulence populaire fut souvent proportionnelle à la violence des derniers affrontements avec la Wehrmacht ou la Milice.

    La désignation de boucs émissaires a pris alors une tournure sexuée : au trop classique voyeurisme des mâles, s'est ajouté le sentiment plus ou moins confus que ces femmes, qui avaient trahi la France en livrant leur corps, devaient recevoir un châtiment spécifique à leur sexe.

    On n'aura garde d'oublier, malgré tout, que, en ce qui concerne celles qui furent accusées d'avoir dénoncé (et les délatrices avaient été nombreuses), cette humiliation leur permit assez souvent, semble-t-il, d'échapper au peloton d'exécution qui attendait les délateurs.

    Reste que la mémoire officielle préféra refouler l'existence des "Tondues".
    Ce sont les écrivains et les cinéastes qui ont su évoquer et reconstituer le parcours des malheureuses ainsi mises au pilori.

    Citons Marguerite Duras et Alain Resnais, dont l'héroïne tondue de Hiroshima mon amour s'explique :
    "Je devins sa femme dans le crépuscule, le bonheur et la honte".

    Et le poème bien connu de Paul Eluard, Au rendez-vous allemand, porte précisément en exergue la phrase :

    "En ce temps-là, pour ne pas châtier les coupables, on maltraitait les filles.
      
    On alla même jusqu'à les tondre".

    Ses six premiers vers en disent long ...

    Au rendez-vous allemand
    Paul Eluard
    1944

    Comprenne qui voudra
    Moi mon remords ce fut
    La malheureuse qui resta
    Sur le pavé
    La victime raisonnable
    À la robe déchirée
    Au regard d'enfant perdue
    Découronnée défigurée
    Celle qui ressemble aux morts
    Qui sont morts pour être aimés
    Une fille faite pour un bouquet
    Et couverte
    Du noir crachat des ténèbres
    Une fille galante
    Comme une aurore de premier mai
    La plus aimable bête
    Souillée et qui n'a pas compris
    Qu'elle est souillée
    Une bête prise au piège
    Des amateurs de beauté
    Et ma mère la femme
    Voudrait bien dorloter
    Cette image idéale
    De son malheur sur terre.

    L’historien Fabrice Virgili arrive même à débusquer quelques découvertes renversantes :
      
    outre le fait que la vision négative de cette pratique surgit dès la Libération.
      
      
    On peut en prendre pour illustration ce poème, d'une des plus grandes figures intellectuelles de la Résistance, Paul Eluard "Comprenne qui voudra", ou que les prostituées échappent souvent à cette condamnation en retour du caractère professionnel de leurs fréquentations, on apprend qu’une cinquantaine d’hommes ont été tondus.
     


    Pour la plupart il s’agit de jeunes qui refusent de partir combattre les Allemands après la libération de leur région (un engagement qui n’a rien de négligeable au demeurant puisque quelque 20000 soldats furent tués), et que des résistants sanctionnent de la sorte l’emprise du châtiment dans la société française permet toute forme de glissement, si elle ne désigne pas dans le cas présent une collaboration, elle permet la dénonciation d’un manque de courage, d’une absence de virilité combattante, corroborant l’inscription de la pratique dans une geste guerrière. (…)
     


    Aucun homme n’est tondu pour avoir eu des relations avec une Allemande ou un Allemand. La sexualité masculine demeure une affaire privée. Les hommes disposent d’une liberté sexuelle implicite et si le corps des femmes est objet de réappropriation, celui des hommes est surtout objet de silence".

    Gabriel Péri
    Paul Eluard

    Un homme est mort qui n'avait pour défense
    Que ses bras ouverts à la vie
    Un homme est mort qui n'avait d'autre route
    Que celle où l'on hait les fusils
    Un homme est mort qui continue la lutte
    Contre la mort contre l'oublie
    Car tout ce qu'il coulait
    Nous le voulions aussi
    Nous le voulons aujourd'hui
    Que le bonheur soit la lumière
    Au fond des yeux au fond du cœur
    Et la justice sur la terre
    Il y a des mots qui font vivre[2]
    Et ce sont des mots innocents
    Le mot chaleur le mot confiance
    Amour justice et le mot liberté
    Le mot enfant et le mot gentillesse
    Et certains noms de fleurs et certains noms de fruits
    Le mot courage et le mot découvrir
    Et le mot frère et le mot camarade
    Et certains noms de pays de villages
    Et certains noms de femmes et d'amies
    Ajoutons-y Péri
    Péri est mort pour ce qui nous fait vivre
    Tutoyons-le sa poitrine est trouée
    Mais grâce à lui nous nous connaissons mieux
    Tutoyons-nous son espoir est vivant.
     




     
      
    Gabriel Péri était un journaliste apprécié des résistants
    Il faisait partit des 92 otages fusillés le 15 décembre 1941 au mont Valérien
    Péri défendait la vie contre les fusils, sa mort prend la valeur d'un martyre


    "Quand la tondeuse vengeresse la privera t'elle d'un de ses moyens de séduction ?"
      
    s'interroge l'éditorialiste de La Libération de l'Aunis et de la Saintonge.

    On assiste alors à une mise en scène du corps de la femme qui a séduit l'ennemi, qui a profité de l'Occupation pour échapper aux souffrances, qui s'est vendu au "boche".

    Que se soit par les insultes de la foule "Puisque tu as fait la putain avec eux depuis quatre ans, toi aussi tu vas prendre", l'apposition de pancartes "raous... j'ai couché avec les boches !...", la mise au pilori

    "Sommairement vêtues ou barbouillées, le crâne tondu, celles-là passent au pilori avant d'être dirigées sur les prisons", ou dans certains cas la dénudation, le corps est mis en avant dans cette cérémonie expiatoire.

    Le corps est ainsi dégradé par la coupe des cheveux, mais aussi par les coups, les inscriptions de croix gammées faites au goudron ou à la peinture, ou encore, en détournant un autre élément de la séduction, le rouge à lèvre.

    Il s'agit par la tonte non seulement d'exclure la femme de la communauté nationale, mais aussi de détruire l'image de sa féminité.
      
      
    À l'érotisation qui prépare la tonte, succède ainsi un processus de désexualisation.
      
      
    Le corps ne doit être alors que le support des signes de la trahison.

    Elles porteront sur leur corps la trace de leur infamie [...] celles qui sont indignes des noms de femme et de Française.

    Les coupables perdent leur nom de femme pour n'être plus désignée que sous le vocable de "Tondue"; il y a destruction symbolique du corps sexué, la destruction réelle du corps par l'exécution n'étant que très rarement l'issue d'une tonte.

    Le seul témoignage de la séduction passée de ces femmes réside dans les mentions des "mèches blondes et brunes qui ne tardèrent pas à joncher le sol". Ces mèches restent sur le sol, "la Tondue" s'éloigne, la rupture a bien eu lieu avec les années noires.

    La coupe des cheveux a bien pour fonction d'enlaidir ces femmes au point de les "effacer" de la communauté.
     

    Elles portent publiquement les marques de leur infamie ...
    elles sont rejetées du sein de la Nation française.
     

    La laideur physique de ces crânes rasés vient naturellement orner ou plutôt révéler à tous leur laideur morale.

    On relève dans le quotidien Voies Nouvelles ce passage qui semble se complaire dans la description de cette dégradation :

    " Un être étrange bizarrement humain menait la danse.
      
    À force d'écarquiller les yeux, on reconnut des formes féminines et, sous un crâne en boule d'ivoire marqué de la peinture infamante, des yeux torves, une bouche baveuse : la hideur d'un déchet".

    Ces descriptions, comprenons-le bien, concernent avant tout les "Tondues" et non les tontes. Celles-ci paraissent bien anodines pour la plupart, quand elles sont mises en parallèle avec les horreurs de l'Occupation et du nazisme.

    Il s'agit donc de détruire l'image de ces femmes sans détruire l'image d'un peuple qui se libère.
    Accusation que l'on retrouve cependant dans certaines prises de position : "ne salissons pas notre victoire, notre belle victoire populaire" proclame par exemple La Marseillaise au sujet d'une dénudation publique.

    La plupart de ces descriptions jouent plus sur le registre de la moquerie que sur celui de l'horreur. Ce sont des variations sur le thème de "l'esthétique de la nouvelle ondulation" qui sont utilisées dans ces représentations. On ironise ainsi sur ceux "qui ont manié la tondeuse sans se soucier des règles posées par la mode ou l'élégance...

    Des profanes dans l'art de la peinture (qui ont) employé le goudron pour corriger des femmes de leur inconduite notoire". Ce jeu d'équilibre entre description de la laideur et préservation de l'image de la Libération conduit au paradoxe de voir les symboles honnis du nazisme devenir "de magnifiques croix gammées" quand celles-ci ornent les joues, le front et la tête des tondues d'Albi.

    Les crânes rasés des "collaboratrices horizontales" deviennent une image positive de l'épuration et de la reconstruction et la "tondeuse épuratoire" en est un instrument privilégié.

    La coupe des cheveux se transforme en mesure d'hygiène, la condition nécessaire au nettoyage du pays.
     

    Il faut qu'à leur retour (prisonniers et déportés) la "désinfection" soit terminée, pour les recevoir dans une Saintonge calmée et propre.

    Comme la tête d'un gamin que l'on débarrassait de ses poux , les chevelures de ces femmes renferment "les miasmes de l'infection bochisante".
      
    Au-delà du discours, on assiste à une véritable campagne prophylactique dans le département des Pyrénées-Orientales où le CDL y prend la mesure suivante.
     




     
      
    Certaines catégories de femmes sont exclues de la tonte dans certains territoires : ainsi, le Comité De Libération des Pyrénées-Orientales exclue les prostituées de la tonte, car elles n’ont fait que leur métier, mais prévoit que toutes les femmes ayant eu des rapports intimes avec l’ennemi auront la tête rasée.

    "à l'exception des prostituées des maisons publiques, les femmes qui ont eu des rapports intimes avec les Allemands devront avoir la tête rasée. Et seront en outre soumises pendant six mois à la visite médicale bi-hebdomadaire à laquelle sont astreintes les prostituées surveillées".

    La "collaboration horizontale" est vécue, dans le prolongement de l'adultère à la Nation, comme une véritable souillure dont est victime le pays. C'est le corps de Marianne qui en est à la fois l'auteur et la victime. Un avocat, dans une forme de justice particulière aux Cours martiales, peut ainsi réclamer "une punition de rigueur (pour sa cliente, coupable) d'avoir déshonoré la femme française".

    La coupe des cheveux doit permettre au pays de retrouver son honneur, d'effacer la souillure portée par le corps de ses femmes. Alain Brossat l'indique dans un chapitre où il fait le parallèle avec le châtiment des sorcières.

    Tout se passe comme si "la Tondue" était chargée d'emporter avec elle dans le désert de l'exil social tous les péchés, tous les crimes de la collaboration.

    C'est à cette condition que le pays peut retrouver son unité. La "Tondue" devient ainsi un formidable enjeu de réappropriation. La participation active ou passive d'une part importante de la population, la mise en scène du cortège et du châtiment font partie de la reconquête d'un espace perdu.

    Ainsi comme le souligne Pierre Laborie :

    C'est à la lumière de ce passage brutal de l'abattement à l'explosion qu'il faut aussi juger les débordements et les démonstrations excessives de la Libération.

    Les tontes, avec les défilés, les maisons pavoisées, les bals "sont belles" parce qu'elles expriment les promesses de lendemains qui chantent, une fierté retrouvée aux dépens de ces femmes qui n'ont pas compris que, plus que jamais, leur corps ne leur appartient pas. Il est comme tout le reste un enjeu politique. Avoir eu des relations sexuelles avec un soldat allemand devient alors "la grande trahison des garces".

    La collaboration féminine durant la Seconde Guerre mondiale concerne en majorité des employées de bureau et des femmes apportant des renseignements à l’armée allemande, ainsi que la collaboration sentimentale.

    Le terme de collaboration horizontale s’applique quand les femmes des pays occupés ont accepté durant l’Occupation, d’avoir des relations sexuelles avec un Allemand.
    Le phénomène est important : environ un cinquième des collaborateurs poursuivis sont des femmes.

    Environ 6000 femmes sont incarcérées à Fresnes en 1946 pour collaboration.
    Elles sont condamnées globalement aux mêmes peines. Travaux forcés, prison, voire peine de mort.

    Cependant, les motifs d’inculpation diffèrent : dans 68 % des cas, elles le sont pour dénonciation. Les autres motifs sont les relations intimes avec l’occupant "collaboration horizontale", la prostitution, les relations (familiales, amicales ou d’intérêt) avec des collaborateurs, et un emploi à la Gestapo ou à l’Abwehr.

    Quelques condamnations sont prononcées également pour collaboration économique, marché noir, propos antinationaux et adhésion à un organisme collaborateur.

    La sexualité n’est souvent pas un motif retenu de poursuites : la chambre civique de Rennes casse un arrêt de celle de Quimper, en considérant que les relations sexuelles avec un membre des troupes d’occupation "ne constituent pas une aide directe ou indirecte à l'Allemagne".

    La promiscuité avec ces troupes entraîne cependant un plus grand soupçon concernant la délation.

    La répression de la collaboration féminine ne diffère pas de la l’épuration générale : des exécutions sommaires ont eu lieu. 454, dont quelques unes paient pour un homme de leur entourage, époux, patron, fils, amant, parfois la tonte des coupables les punit dans leur corps ; ensuite, la répression judiciaire prend le relais.

    Deux camps sont réservés aux femmes collaboratrices, à Jargeau et Haguenau. En 1946, elles sont internés dans 14 centres spécialisés, dont deux centrales (Rennes et Haguenau).
    En 1951, la seule centrale subsistante est celle de Rennes.

    Dans certains départements à forte présence militaire allemande, le nombre de femmes condamnées à l’indignité nationale est supérieur au nombre d’hommes condamnés à la même peine, essentiellement pour "collaboration sentimentale" (terme administratif d’époque).

    Dans le Morbihan (où se trouvent les ports de Lorient et Vannes), 55 % des personnes arrêtées, mais 69 % des condamnés sont des femmes.
    Elles sont de plus, condamnées à des peines plus lourdes que les hommes.

    Lorient offre un cas particulier, étudié par Luc Capdevilla : la ville résiste jusqu’à la fin de la guerre, et les civils sont évacués à 90 % en février 1945. Dans les 194 collaborateurs arrêtés le 8 mai, 189 sont des femmes, concubines de soldats allemands. Ils s’agit essentiellement de femmes jeunes, voire mineures, de milieux pauvres, sans ressources ni solidarités (orphelines d’au moins un parent pour la moitié d’entre elles), déracinées (un tiers viennent de l’extérieur de la Bretagne).

    L’image répandue de la femme légère, changeant souvent d’amants ou trompant son mari prisonnier en Allemagne, ne concerne que quelques unes de ces femmes, qui cherchaient pour la plupart un protecteur.

    Les reproches qu’on leur adresse tiennent plus à leur anti-conformisme, voulu ou subi : elles sont indépendantes financièrement car elles travaillent, disposent de leur corps en ayant un amant hors-mariage, voire en n’ayant pas d’enfant, le tout en-dehors de toute structure patriarcale.

    Il est important de bien distinguer l’épuration extrajudiciaire, qualifiée de “sauvage”, de l’épuration judiciaire, qualifiée de “légale”.

    À l’initiative des organisations issues de la Résistance (FFI, Comités de Libération) et des commissaires de la République, des tribunaux réguliers sont établis.

    Ils succèdent aux juridictions exceptionnelles et portent le nom de cours martiales, de tribunaux militaires ou de tribunaux populaires.

    Le 5 septembre 1944, une Cour martiale composée de FFI est créée en Dordogne. Elle siège à Périgueux jusqu’au 20 octobre 1944.

    En 23 sessions comparaissent 172 personnes.
    20 % d’entre elles sont condamnées à mort.

    Le 6 novembre 1944, une juridiction civile, la Cour de justice, est mise en place.
    Entre le 13 novembre 1944 et le 4 août 1945, elle tient 119 audiences.

    Du 28 novembre 1944 au 30 juillet 1945, parallèlement à la Cour de justice siège une Chambre civique. Elle juge les faits de collaboration mineurs et prononce 176 condamnations à l’indignité nationale.

    Si les tontes sont dans leur quasi totalité extra-judiciaires, il n'en existe pas moins un débat sur les poursuites pour "collaboration horizontale".

    Comme le montre ce rapport du Commissaire Régional de la République, les avis sont partagés sur les bases juridiques qui doivent permettre de sanctionner celles qui en sont coupables.

    Des divergences se sont produites entre les décisions des Chambres civiques relativement à la répression de la collaboration horizontale. Alors que certaines Chambres civiques se saisissent de tous les cas, quelles que soient les intéressées et les circonstances, certaines autres entendent faire des discriminations.

    Les unes refusent de prononcer l'Indignité nationale des femmes qui font de la prostitution leur métier, estimant que leur conduite revêt un caractère professionnel et nullement politique. D'autres se demandent si la Chambre civique peut se saisir en l'absence d'une plainte déposée par le mari, la collaboration horizontale étant d'abord un adultère.

    Bien qu'il s'agisse là d'interrogations juridiques qui n'ont pas d'effet sur la décision de tondre, elles marquent les réticences à confondre vie privée et vie publique.
      
    La référence juridique reste pourtant l'article 1 de l'ordonnance du 26 décembre 44, qui déclare "coupable d'indignité nationale tout individu qui a sciemment apporté, en France ou à l'étranger, une aide directe ou indirecte à l'Allemagne". Les relations intimes en font donc partie.

    La situation des femmes de prisonniers de guerre est encore plus claire.

    Les sources faisant état de tontes signalent fréquemment un mari prisonnier.

    Dans l'Oise, le Préfet propose, dans son rapport concernant l'assistance aux prisonniers, "que les procédures soient plus rapides pour donner satisfaction aux rapatriés pouvant apporter des preuves absolument certaines d'inconduite notoire".

    On note, pour les femmes de prisonniers, une vigilance accrue du voisinage, une responsabilité collective qui ne leur pardonne pas d'avoir eu des relations avec un autre homme, encore moins si celui ci est membre des troupes d'occupation.

    La particularité réside dans la complémentarité entre cette surveillance de la communauté et une loi promulguée le 23 décembre 1942 par Vichy - et non supprimée depuis - qui permet "au Ministère Public d'intervenir, sans plainte du mari, pour sanctionner le concubinage notoire d'une épouse d'une personne retenue au loin par suite des circonstances de la guerre".

    Pour Michèle Bordeaux, " l'ordre familial est une affaire d'État qui ne peut être confié au seul mari, le Parquet est le substitut du chef de famille".

    Il existe bien une représentation sexuelle de la collaboration.
      
    Le corps féminin est l'objet de cette trahison, c'est donc ce corps qui doit être châtié.
     





     
      
    Dans l'émission de radio "Là-bas si j'y suis" diffusée sur France Inter en 2002, Daniel Mermet nous présente ces évènements des années noires et le témoignage de Madeleine, allias Mandeline.

    Madeleine a enregistré cette séquence à 81 ans lors de son témoignage en 2002.
    A choisir d'être envoyée en Allemagne pour le STO, le travail obligatoire, elle préfèrera rester à Aix Les Bains dans l'hôtel ou elle travaillera dans la restauration dans un premier temps et ensuite avec les Allemands en tant qu'aide à l'infirmerie et dans les blocs opératoires improvisés.

    Madeleine rencontre Siegfried en 1943 alors qu'elle travaille à Aix Les Bains dans un hôtel qui a été transformé en hôpital par les Allemands. Cet hôtel reçoit bon nombre de blessés qui viennent de Casino en Italie ou une grande bataille se déroule.

    Siegfried est alors un jeune adjudant chef de la Wehrmacht, un infirmier de 23 ans, blond aux yeux bleus, au visage souriant. Madeleine et Siegfried tombent amoureux, et ils développent alors une relation de couple.

    Séparés un temps à la Libération, ils se retouveront et vivront ensemble en Allemagne après la guerre. Son fiancé allemand l’épousera en 1949 à Munich.
    A la Libération, Madeleine sera tondue.

    La "tonte" eut lieu un dimanche matin, sur "le parvis de la mairie" du village de Mure, devant "la foule rassemblée qui jetait des pierres". "Une estrade a été montée".

    "Les gendarmes sont là, ils protègent et amènent les femmes sur cette scène. Madeleine est accompagnée d'un gendarme qui lui dit de se taire pour éviter le pire.

    Elle monte sur cette scène, elle s'asseoit sur une chaise, puis elle est tondue sous les cris et les insultes".

    Madeleine nous dit que c'était comme si on l'avait "amené à l'échafaud". Elle parle d'une scène "traumatisante" pour elle (depuis elle ferme les yeux chaque fois qu'elle repasse en voiture devant cette mairie de ce petit village).

    Elle se souvient des insultes "Salope".
      
    "T'as pas honte" et des moqueries vicieuses "Alors, qu'est ce qui t'a plu chez ce boche,
    il avait un velours ?".

    Dans certains villages, certaines villes, devant une foule en délire, la foule est allée jusqu'à déshabiller les femmes complètement sur la place publique avant de les tondre.
      
    Dans d'autres cas, on a peint des croix gammées sur leurs poitrines.

    Nombreux sont ceux également qui témoignent de jets de pierre lancés sur ces femmes.
     
     




     
    Aujourd'hui, cette épisode de honte faite à ces femmes est devenu un secret dans de nombreuses familles.
      
    La honte est toujours active dans ce secret comme on peut le voir au regard de deux informations communiquées lors de cette émission.

    Dans les familles de femmes "Tondues", le secret est toujours là quand les mères n'ont jamais rien divulgué.
     

    Comme nous le raconte cet auditeur de "Là-bas si j'y suis" en parlant de sa soeur sur le répondeur de l'émission, de nombreuses personnes nées en 1944 1945 ne savent toujours pas qu'elles sont issues d'une relation de leur mère avec un occupant allemand.

    Le nouveau coup d'éclat de Georges Frêche, lundi 18 février 2008.

    L’Occupation a marqué. Des histoires d’amour ont vu le jour. De ces unions secrètes sont nés des enfants… de la passion ou de la guerre. Une descendance franco-allemande, témoin de l’histoire.

    Pour le politicien Georges Frêche, les femmes tondues à la Libération aurait pu être fusillées.

    A la Libération, les femmes françaises ayant fréquenté des Allemands sont traquées et tondues par les résistants. Ce qui a priori ne choque pas Georges Frêche.

    D’après Le Midi Libre, le socialiste aurait déclaré lors d’une inauguration du lycée Jean-Moulin à Béziers, le 12 février 2008 :

    "Il existe aujourd’hui une mode qui consiste à protester contre les résistants qui tondaient les femmes qui avaient couché avec les Allemands pendant l’Occupation.

    Elles ne pouvaient pas coucher avec les résistants ...?
    Vous croyez que je vais pleurnicher parce qu’on leur a coupé les cheveux ? Mais c’était gentil ...!
    On aurait pu les fusiller ... Mon père était officier de la Résistance : jusqu’à ma mort, je serai de ce côté !"

    Fils de l’amour
    Jean Jacques Delorme habite à Menton (06), il est membre de l’association Cœurs sans frontières.
    Son histoire est singulière mais elle est la plus belle preuve d’amour entre une Française et un Allemand.

    L’erreur de ses parents : s’être rencontrés au mauvais endroit au mauvais moment, début 1944. La guerre ne les a pas empêchés de s’aimer. Et Jean Jacques est né de cette romance.

    Quarante ans plus tard
    Mme Delorme peut s’estimer heureuse, elle n’a pas été tondue… simplement arrêtée, condamnée à un an de prison et déchue de ses droits, le 15 octobre 1944. Jean Jacques Delorme n’a jamais connu son père. Après une enfance douloureuse, il découvre la vérité à son propos.

    Il confie au quotidien régional :
      
    "J’ai mis quarante ans pour retrouver sa trace".

    Il y a deux ans, en Allemagne, il fait aussi la connaissance de son frère et de sa sœur.
      
    Des retrouvailles qui lui permettent de se reconstruire.
      
    Le plus grand réconfort de cet homme est sans nul doute de savoir que sa naissance est le fruit de l’amour.(Edition France Soir du lundi 18 février 2008 n°19724 page 8)
     



    Photo Robert Capa

     
      
    Au minimum, plusieurs dizaines de milliers de Françaises ont eu des relations avec l'occupant. On estime à au moins 50 000 le nombre d'enfants nés d'amours franco-allemands.

    Précisons encore qu'il s'agit souvent de femmes de milieux modestes et que, à côté d'un nombre relativement significatif de "demoiselles des P.T.T.", on trouve surtout celles qui, comme elles, ont eu à fréquenter l'occupant en tant que femmes de service.

    Les rues étaient joyeuses à la libération
    Les parisiens trinquaient sur les nappes à carreaux
    Pour fêter dignement la fin de l’oppression.
    A nouveau sur les toits rayonnaient les drapeaux.

    Mais les cris d’allégresse se couvrirent de haine
    Lorsque vint la curée aux abords de la Seine.
    De nombreux anathèmes fusèrent en taloches
    Contre ceux soupçonnés d’avoir servi les boches.

    Une femme eut le tort d’avoir offert son cœur
    A un homme ennemi, un soldat vert de gris
    La vindicte cruelle lui hurla son mépris
    Au milieu d’une foule rongée par la rancœur.

    Traînée par les cheveux elle fut emmenée
    Au centre de la place sous une pluie d’insultes
    Pour la faire payer cette vilaine pute
    Pour la faire pleurer cette sale traînée.

    De force elle s’assit sur un vieux tabouret.
    Elle baissa les yeux ne voulant regarder
    Les nombreux yeux avides de voir l’humiliation
    Qu’elle allait endurer avec résignation.

    Par des cliquetis sombres étant apostrophée
    Une tondeuse agit, rasant sa chevelure
    Le peuple s’en saisit en guise de trophée
    Et cracha au visage de cette fille impure.

    Elle quitta l’estrade sous tous les quolibets.
    Etaient-ils préférables au vulgaire gibet ?
    Car l’âme tourmentée d’un douloureux marasme
    Fut toujours poursuivie d’injures et de sarcasmes.

    Par zazou publié dans : poèmes communauté

    A Quimper (Finistère), tondues par les Allemands.

    Le 3 juillet 1944, Mado, 23 ans, a la tête rasée par les Allemands avec 21 autres femmes et jeunes filles de Quimperlé. Cette expédition punitive, destinée à venger deux jeunes femmes "Tondues" par des résistants pour avoir fréquenté l'ennemi, a été passé sous silence pendant de nombreuses années.
     




     
      
    16 des 22 jeunes femmes "Tondues" par les Allemands, en guise de représaille
    La photo a été prise à leur demande, quelques jours après la Libération...
    En haut coin droit et gauche, les deux coiffeurs réquisitionnés


    "Le 2 juillet 1944, un officier Allemand, amant d'une jeune femme tondue la veille par les patriotes, porte plainte à la Feldgendarmerie. Selon la loi du Talion, il est décidé de les venger en rasant la tête de 20 Françaises dont le frère, le mari ou le père sont connus comme résistants.

    Le 2 juillet, il devait être onze heures du soir.
      
    J'étais déjà dans mon lit, quand j'ai entendu les "colliers de chien", les gendarmes Allemands, frapper à la porte et monter à grands pas dans l'escalier jusqu'à ma chambre. Je les entends encore ...
     




     
      
    Ne sachant pas où, ni pour combien de temps ils m'emmenaient, ma mère m'a donné une robe d'hiver... Ils m'ont poussé dans une voiture et j'ai été emmennée au couvent des Ursulines, qui servait de prison sous l'Occupation.

    Nous étions 22 dans une grande pièce avec des lits superposés. Je n'ai pas dormi de la nuit, j'ai regardé l'aube se lever... On ne savait pas ce qui nous attendait.

    Au matin, ils nous ont toutes posé la même question :

    "...si vous nous donnez le nom et l'adresse de résistants vous pouvez sortir. Sinon ..."

    Aucune n'a parlé.

    Ils nous ont fait descendre deux par deux dans une grande cage grillagée. Je suis descendue la première avec une autre jeune fille.Deux sièges nous attendaient. Les Allemands ont ordonné à deux prisonniers de nous couper les cheveux. Ces deux-là tremblaient, hésitaient.


    J'ai dit à celui qui s'occupait de moi : "vas-y, avant qu'ils ne nous tuent !"
    Puis les Allemands ont réquisitionné deux coiffeurs pour nous raser complétement la tête. L'une de nous a d'ailleurs épousé son tondeur après la guerre.

    En remontant au deuxième étage de la prison, on ne se reconnaissait pas entre nous. Ils nous ont reposé la même question que la première fois, puis nous ont laissé repartir.
    Quand, arrivée chez moi, je me suis regardé dans la glace, je me suis sentie déshabillée...

    Une modiste nous a donné des turbans pour cacher nos crânes rasés.
    Une fois à Quimper, on m'a pourtant jeté des pierres, croyant que j'avais été tondue par des patriotes, après la Libération, en aôut 1944.

    En septembre de la même année, j'ai reçu un papier, frappé du tampon de la Résistance Française et signé par le chef de la police. Il précisé que j'avais été "Tondue", non pas par les patriotes à la Libération, mais par les "Boches" avant la fin de la guerre.

    C'était important pour trouver du travail ... Pour l'honneur aussi ..."

     
    La tondue
    Georges Brassens
    1964

    La belle qui couchait avec le roi de Prusse
    Avec le roi de Prusse
    A qui l'on a tondu le crâne rasibus
    Le crâne rasibus
    Son penchant prononcé pour les " ich liebe dich ",
    Pour les " ich liebe dich "
    Lui valut de porter quelques cheveux postich's
    Quelques cheveux postich's
    Les braves sans-culott's et les bonnets phrygiens
    Et les bonnets phrygiens
    Ont livre sa crinière à un tondeur de chiens
    A un tondeur de chiens
    J'aurais dû prendre un peu parti pour sa toison
    Parti pour sa toison
    J'aurais dû dire un mot pour sauver son chignon
    Pour sauver son chignon
    Mais je n'ai pas bougé du fond de ma torpeur
    Du fond de ma torpeur
    Les coupeurs de cheveux en quatre m'ont fait peur
    En quatre m'ont fait peur
    Quand, pire qu'une brosse, elle eut été tondue
    Elle eut été tondue
    J'ai dit : " C'est malheureux, ces accroch'-cœur perdus
    Ces accroch'-cœur perdus "
    Et, ramassant l'un d'eux qui traînait dans l'ornière
    Qui traînait dans l'ornière
    Je l'ai, comme une fleur, mis à ma boutonnière
    Mis à ma boutonnière
    En me voyant partir arborant mon toupet
    Arborant mon toupet
    Tous ces coupeurs de natt's m'ont pris pour un suspect
    M'ont pris pour un suspect
    Comme de la patrie je ne mérite guère
    Je ne mérite guère
    J'ai pas la Croix d'honneur, j'ai pas la croix de guerre
    J'ai pas la croix de guerre
    Et je n'en souffre pas avec trop de rigueur
    Avec trop de rigueur
    J'ai ma rosette à moi: c'est un accroche-cœur
    C'est un accroche-cœur
     


    Tondeurs et oppositions et condamnations des tontes

     
      
    Il est possible de définir deux catégories de tondeurs en utilisant le critère de la "légalité" de la tonte.

    En premier lieu, des résistants, FFI, accompagnent ou effectuent une tonte. Auquel cas, les FFI agissent pour le compte de la "justice populaire", comme ce fut le cas de plusieurs exécutions sommaires lors de la Libération de Paris.

    En second lieu, les tontes sont le fait de mouvement spontanés de la foule ou sont des initiatives personnelles appuyées par la foule. Ces tondeurs, sans avoir de pouvoir ou de hiérarchie, décident elles-même de la tonte et de la désignation des tondues.

    Un peu partout, les FFI, FTP, CDL et autorités appellent à la fin des brimades et désapprouvent les tontes. De même, les tontes sont rapprochées des procédés fascistes dans la presse (parfois précédées d’encouragement à la tonte). Sartre s’élève également contre ce châtiment qu’il juge moyenâgeux.
     
      
    Quelques femmes porteront plainte contre leurs tondeurs.
     
     
     
     
     
     
     
    http://congovox.blogspot.fr/2013/04/les-tondues-de-la-liberation.html
     
     
     
     
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    Les femmes tondues : une mise au pilori sexiste

      

      

    Jusqu’à très récemment, les historiens ont eu tendance à réduire l’événement des femmes tondues, le tenant pour un phénomène marginal. Sans doute l’acte de tondre les femmes n’est-il pas propre à la France :

      

    déjà, les Allemandes avaient subi ce sort pour avoir couché avec des militaires français occupant la Rhénanie, et des Italiennes ont été traitées de la même façon à la Libération.

     

    Pourtant, comme l’a bien montré Alain Bross, ce qu’il appelle « le carnaval des tondues » mérite d’autant plus d’être étudié que la mémoire nationale a jeté sur lui un voile bien oublieux.

     

    Le rituel du spectacle expiatoire a ses constantes : cortèges bruyants de femmes et surtout d’hommes promenant à travers villages, bourgs ou villes des femmes portant sur le front, sur la poitrine, voire sur d’autres parties du corps, tracées au goudron ou à la peinture, des croix gammées et des inscriptions explicites :

     

     

    « a dénoncé », « Collabo », et plus souvent encore « a couché avec les boches ».

      

    Les victimes étaient presque toujours à demi, parfois totalement dévêtues.

      

    Certaines portaient dans les bras leur enfant.

      

      

      

    Si elles n’avaient pas été immédiatement tondues, elles l’étaient de façon solennelle, sur une estrade placée devant un bâtiment public, et elles restaient ensuite exposées, comme jadis au pilori.

     

     

     

     

    Cette « coiffure 1944 » était infligée à des femmes considérées soit comme des délatrices, soit comme des « collaboratrices à l’horizontale ».

      

    Il a été couramment admis, mais trop vite, que ces dernières étaient en majorité des prostituées, ce qui permettait de supposer que les Françaises (en exceptant Arletty ou Coco Channel, qui avaient pu s’afficher avec un officier allemand), avaient été vraiment peu nombreuses à succomber au charme de guerriers supposés tous blonds.

      

      

    Or, Philippe Buri  peut écrire que « au minimum plusieurs dizaines de milliers de Françaises ont eu des relations avec l’occupant », ajoutant qu’on estime à

    au moins 50 000 le nombre d’enfants nés d’amours franco-allemandes.

     

     

      

    Précisons encore qu’il s’agit souvent de femmes de milieux modestes et que, à côté d’un nombre relativement significatif de « demoiselles des P.T.T. », on trouve surtout celles qui, comme elles, ont eu à fréquenter l’occupant en tant que femmes de service.

     

      

    On affirme volontiers que les explosions de haine à leur encontre ont été brèves et localisées, et qu’elles étaient menées par des résistants de la onzième heure à qui ce zèle purificateur permettait d’acquérir à bon compte une conduite patriotique.

      

      

    En fait, malgré les instructions officielles, des femmes continuèrent d’être tondues jusqu’à la fin de l’hiver 1944-1945

      

      

    Et ce furent assez souvent des chefs des maquis ou les responsables des Comités de libération qui patronnèrent ces cérémonies expiatoires.

     

     

     

      

      

    Ces comportements représentent une sorte de défoulement, après la tension insupportable des semaines qui ont précédé la Libération, ils témoignent de l’exaspération de ceux qui avaient vécu quatre années d’humiliation, qui venaient de subir les ultimes exactions de l’occupant et de ses complices français.

      

      

    Ce qui explique que la virulence populaire fut souvent proportionnelle à la violence des derniers affrontements avec la Wehrmacht ou la Milice.


    Photo Robert Capa

      

      

    La désignation de boucs émissaires a pris alors une tournure sexuée : au trop classique voyeurisme des mâles, s’est ajouté le sentiment plus ou moins confus que ces femmes, qui avaient trahi la France en livrant leur corps, devaient recevoir un châtiment spécifique à leur sexe.

     

     

    On n’aura garde d’oublier, malgré tout, que, en ce qui concerne celles qui furent accusées d’avoir dénoncé (et les délatrices avaient été nombreuses), cette humiliation leur permit assez souvent, semble-t-il, d’échapper au peloton d’exécution qui attendait les délateurs.

      

      

    Reste que la mémoire officielle préféra refouler l’existence des « tondues ».

      

    Ce sont les écrivains et les cinéastes qui ont su évoquer et reconstituer le parcours des malheureuses ainsi mises au pilori.

      

    Citons Marguerite Duras et Alain Resnais, dont l’héroïne tondue de Hiroshima mon amour s’explique : « Je devins sa femme dans le crépuscule, le bonheur et la honte"

    Et le poème bien connu de Paul Eluard,

     

    Ses six premiers vers en disent long ...

    Au rendez-vous allemand
    Paul Eluard
    1944

    Comprenne qui voudra
    Moi mon remords ce fut
    La malheureuse qui resta
    Sur le pavé
    La victime raisonnable
    À la robe déchirée
    Au regard d'enfant perdue
    Découronnée défigurée
    Celle qui ressemble aux morts
    Qui sont morts pour être aimés
    Une fille faite pour un bouquet
    Et couverte
    Du noir crachat des ténèbres
    Une fille galante
    Comme une aurore de premier mai
    La plus aimable bête
    Souillée et qui n'a pas compris
    Qu'elle est souillée
    Une bête prise au piège
    Des amateurs de beauté
    Et ma mère la femme
    Voudrait bien dorloter
    Cette image idéale
    De son malheur sur terre.

     

      

    intégré Au rendez-vous allemand, qui porte précisément en exergue la phrase :

      

    « En ce temps-là, pour ne pas châtier les coupables, on maltraitait les filles.

      

      

    On alla même jusqu’à les tondre. » Ses six premiers vers en disent long :

      

      

    « Comprenne qui voudra / Moi mon remords ce fut / La malheureuse qui resta / Sur le pavé / La victime raisonnable / A la robe déchirée... »

     

     


    Lire sur ce sujet le récit de Guy Croussy :

    La Tondue.
    Source : http://lang.swarthmore.edu/faculty/...

    Notes

    [2] Burrin, Philippe. La France à l’heure allemande. Le Seuil, 1995."
    Azéma, Jean-Pierre, Wieviorka Olivier. Vichy 1940-1944. Librairie Académique Perrin, 1997. 250.

     

    http://www.tetue.net/?article296

    Qui était les responsables de ces crimes honteuses contre les femmes? 

     
    C’était ceux ou celles qui voulaient la vengeance contre quelqu’un pendant les mois rudes après La Libération.
     
    Georges Brassens chante 'La belle qui couchait avec le roi de Prusse' mais lui 'je n’ai pas bougé du fond de ma torpeur, … les coupeurs de cheveux.. m’ont fait peur'. 
      
    La vengeance cherchée par la foule exigeante était dangereuse et fait peur aux gens innocents
      
      
    Les hommes et les femmes également coupables de ses crimes ont condamnés ses femmes a un sort humiliant. Fabrice Virgili constate “La France sera virile ou morte”. 
      
      
    Donc la virilité, dans ce sens la, voulait dire les cheveux courts ou tondus comme les hommes. 
      
    En 1944, les malfaiteurs guettait les collaboratrices horizontales pour les humilier devant tous les habitants de leur village. 
      
    Environ 20,000 femmes étaient victimes de ses malfaiteurs qui savaient l’importance des cheveux aux femmes.
      
    George Brassens chante 'Et je n’en souffre pas avec trop de rigueur… Ma rosette a moi : c’est un accroche-coeur'. Les témoins étaient beaucoup, sans rien faire pour aider ces femmes. On voit les sourires aux visages de malfaiteurs et le plaisir avec lequel ils ont complété leur tonte.
     
    En conclusion, vous pouvez voir le blâme et le ridicule qui était dirigé aux femmes à cause des difficultés pendant et après la guerre.

    Les Références
     
    Georges Brassens « Paroles La Tondues », http://www.youtube.com/watch?v=2I7NUoQX324, 26/08/12.
     
      
      

     

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    Qu’est-ce que je pense à propos

    de la mutilation des femmes collaboratrices … ?

      

      

      

    Depuis la révolution française, la France a été connu par le monde comme le pays des droits de l’homme.

      

    Néanmoins, il est nécessaire que nous continuions à nous interroger si la devise liberté, égalité, fraternité reste la vérité.

     


    Si nous acceptons que la France soit le pays des droits de l’homme, c’est clair que dans cette situation, la France n’a pas été à la hauteur de cette réputation en ce qui concerne les femmes tondues.
      
    L’instance des femmes tondues est une tâche sur l’histoire de la France (Moore).
      
    L’article de Clio dit que les femmes collaboratrices étaient
      
      
    « effacer de la communauté » ;
     
      
    je pense parce que c’était un groupe facile de blâmer.
      
      
    Renée Guimberteau a écrit que c’était « une terreur sans précédent ».
      
    Alors bien sûr, les tontes seulement ont augmenté l’amertume et l’anéantissement pendent les années après la libération.
      
    Ce n’est pas un exemple d’égalité.
      
     
    C’était une atrocité égale aux actions des Allemands.
      
      
    Beaucoup de temps les « cocodette frivoles » (Virgili) étaient la fiction créée par les autres français.
      
      
    Les effets ont été que les femmes se sentaient indignes des noms de femme et de Française ».
      
    Je crois qu’on puisse voir ces sentiments dans la vidéo dessous.
     

    Ce film documentaire revient sur les destins croisés de femmes tondues à la libération.

    Jusqu’à très récemment, les historiens ont eu tendance à réduire l’épisode des femmes tondues à la Libération, le tenant pour un phénomène marginal. Cette pratique fut pourtant massive et répandue sur l’ensemble du territoire français en 1944-45.

      

    Pour la plupart des femmes tondues, c’est presque toujours la même histoire, celle d’une France occupée dans laquelle les jeunes filles, par insouciance ou inconscience, commettent l’impensable : le délit d’adultère avec l’ennemi de la Nation…

      

      

    Ce film vous invite dans diverses régions de France à la rencontre de Madeleine, Marie et Renée, victimes de tontes à la Libération.

      

    À travers les destins croisés de ces femmes, découvrez un épisode bien peu glorieux de l’histoire de la France.

     
     
     
    Je comprends les raisons pour la vengeance des français.
      
    Bien sûr les français ont voulu la vengeance à cause des horreurs de la guerre.
      
    Cependant, je ne pense pas que ce soit juste pour viser des femmes sans défense.
      
      
    Les femmes étaient visées seulement parce qu’elles étaient un groupe facile à blâmer.
      
    Je pense que cette action n’était pas courageuse parce que beaucoup de français ont collaboré avec les Allemands.
      
      
    Je crois que les malfaiteurs soient faibles, lâches et désespérés.
     
     
    http://www.tetue.net/?rubrique28
     
      
      
      
     
     
     
     
     
     
     
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    L’histoire d’une Femme Accusée

     

    Si vous avez suivi mon blog, vous connaissez que la persécution des femmes tondues pendant et après la deuxième guerre mondiale est arrivée sur une grande échelle. De toute façon, entre 1943 et 1946, 20 000 femmes furent tondues (Virgilli). Cette situation soulève une question essentielle- comment des femmes diésées viser et qu’est-ce que leurs expériences comme les tontes. Je vous raconterai l’histoire triste des femmes collaboratrices en France.
     
    A la fin de la Guerre, les Français ont voulu démontrer leur solidarité et leur allégeance à la Résistance. Ils se sont rendus compte que la méthode plus facile pour prouver leur patriotisme était la tracasserie des collaborateurs. A partir de ce moment-là, les femmes étaient visées.
     
    Plusieurs facteurs ont contribué à la détermination qu’une femme était coupable de la « collaboration horizontale » (Delbouys). Il s’agit de la popularité de la femme, si elle a eu des enfants pendant la guerre et si elle était épouse. Il était courant pour des gens de fabriquer des mensonges accablant à propos des femmes ils n’ont pas aimé, et bien que, pour la plupart, les histoires soient les rumeurs, des dirigeants de la ville ont ordonné que les femmes accusées puissent être torturées et rasées.
     
    Après les femmes ont été accusées, elles étaient séparés à la communauté étant raillées et déshonorées. Prenons les cas dans le Dordogne. En 1944, Renée Guimberteau a écrit qu’il y avait des « promenades des collaboratrices ». Imaginez une parade malveillante pour souligner vos rapports sexuels et le ridicule et le blâme qu’étaient dirigé aux femmes. Voisez un exemple d’une femme accusée dans la photo.
     
     
     
    Cette femme s’appelle Juliet. Elle a habité à Dordogne entre 1932 et 1944.
      
    Son mari était tué en 1942 par un allemand et en 1944, elle est devenue une femme tondue après sa belle-mère avais dit aux autorités qu’elle a fait la
    « collaboration horizontale » (Delbouys) avec les soldats allemands.
      
    Autres sources  prétendent que elle n’a parlé que avec les allemands pour obtenir du sucre et du huile.
     
      
    En septembre 1944, elle était tondue et après tuée à la Grand-Place (Tronel).
     
     
    Il apparait que la punition pour les femmes qui ont eu des relations sexuelles avec les Allemands était disproportionnée à leurs actions.
     
      
    Il est à souhaiter que nous puissions apprendre à la suite de cette violation des droits de l’homme et que les horreurs des femmes tondues ne reproduisent jamais.
     
    Voilà, j’ai fini mon exploration du thème des femmes tondues.
      
    J’espère que vous avez bien lu mon blog et peut-être vous avez aussi appris un petit –peu.
     
    xx
    Stephanie
     
     
     
    SOURCES
     
    http://frenchstudies2012lesfemmestondues.blogspot.fr/2012/10/lhistoire-dune-femme-accusee.html
     
     
     
     
     
     
     

     

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     tondues pendant l'epuration

     

    Partout on dénonce :

    les lettres anonymes affluent.

      

    Un exemple qui donnera le climat :

    dans le journal France-Libre du 26 août, il est écrit :

      

    Il appartient à chaque Français de faire lui-même la police dans son immeuble et dans son quartier et de signaler immédiatement tout suspect aux autorités constituées.

     

     


    Malheur aux concierges ! Le fait de ne pas dénoncer, de cacher un homme en danger peut valoir à son auteur d'être étiqueté « collabo ».

      

    La France retrouve ses « tricoteuses » de la Révolution qui veulent voir du sang et des congénères humiliées.

      

    Elle retrouve ses « chauffeurs » qui pillent, rançonnent, torturent.

      

    Elle retrouve en certains lieux ses sans-culottes mangeurs de curés.

     


    Dans la Guyenne et le Languedoc, des prêtres sont tués l'un d'eux, en Lot-et-Garonne, eut la langue et les yeux arrachés, puis fut pendu par les pieds jusqu'à ce que mort s'ensuive.

      

    Des religieuses accusées d'espionnage sont torturées.

     

    Quand les résistants commençaient à avoir le coup de tondeuse un peu facile

    Femmes tondues, Paris, août 1944. Photo © Serge de Sazo

     

     

    Dans le texte qui suit, publié une première fois dans le Figaro Magazine en 1984, alors qu’on venait de commémorer en grande pompe le débarquement en Normandie, Michel Audiard raconte la libération de Paris telle qu’il l’a vécue, le 25 août 1944.

     

    Vivement qu’on ne se souvienne plus de rien. J’ai la mémoire en horreur. On va quand même faire un petit effort, à cause de l’anniversaire, des présidents sur les plages, de la vente des objets souvenirs qui a si bien marché, de tout ça.

     

    Nous autres, enfants du quatorzième arrondissement, on peut dire qu’on a été libéré avant tous les autres de la capitale, cela en raison d’une position géographique privilégiée. On n’a même pas de mérite. Les Ricains sont arrivés par la porte d’Orléans, on est allé au-devant d’eux sur la route de la Croix-de-Berny, à côté de chez nous.

      

    On était bien content qu’ils arrivent, oui, oui, mais pas tant, remarquez bien, pour que décanillent les ultimes fridolins, que pour mettre fin à l’enthousiasme des « résistants » qui commençaient à avoir le coup de tondeuse un peu facile, lequel pouvait – à mon avis – préfigurer le coup de flingue.

      

    Cette équipe de coiffeurs exaltés me faisait, en vérité, assez peur.

     

    La mode avait démarré d’un coup.

      

    Plusieurs dames du quartier avaient été tondues le matin même, des personnes plutôt gentilles qu’on connaissait bien, avec qui on bavardait souvent sur le pas de la porte les soirs d’été, et voilà qu’on apprenait – dites-donc – qu’elles avaient couché avec des soldats allemands !

    Rien que ça ! On a peine à croire des choses pareilles !

      

    Des mères de famille, des épouses de prisonnier, qui forniquaient avec des boches pour une tablette de chocolat ou un litre de lait.

      

    En somme pour de la nourriture, même pas pour le plaisir.

    Faut vraiment être salopes !

     

    Alors comme ça, pour rire, les patriotes leur peinturlurait des croix gammées sur les seins et leurs rasaient les tifs.

      

    Si vous n’étiez pas de leur avis vous aviez intérêt à ne pas trop le faire savoir, sous peine de vous retrouver devant un tribunal populaire comme il en siégeait sous les préaux d’école, qui vous envoyait devant un peloton également populaire.

      

    C’est alors qu’il présidait un tribunal de ce genre que l’on a arrêté l’illustre docteur Petiot – en uniforme de capitaine – qui avait, comme l’on sait, passé une soixantaine de personnes à la casserole.

     

    Entre parenthèses, puisqu’on parle toubib, je ne connais que deux médecins ayant à proprement parler du génie, mais ni l’un ni l’autre dans la pratique de la médecine : Petiot et Céline. Le premier appartient au panthéon de la criminologie, le second trône sur la plus haute marche de la littérature.

     

    Mais revenons z’au jour de gloire ! Je conserve un souvenir assez particulier de la libération de mon quartier, souvenir lié à une image enténébrante :

    celle d’une fillette martyrisée le jour même de l’entrée de l’armée Patton dans Paris.

     

    Depuis l’aube les blindés s’engouffraient dans la ville. Terrorisé par ce serpent d’acier lui passant au ras des pattes, le lion de Denfert-Rochereau tremblait sur son socle.

     

    Édentée, disloquée, le corps bleu, éclaté par endroits, le regard vitrifié dans une expression de cheval fou, la fillette avait été abandonnée en travers d’un tas de cailloux au carrefour du boulevard Edgard-Quinet et de la rue de la Gaïté, tout près d’où j’habitais alors.

     

    Il n’y avait déjà plus personne autour d’elle, comme sur les places de village quand le cirque est parti.

     

    Ce n’est qu’un peu plus tard que nous avons appris, par les commerçants du coin, comment s’était passée la fiesta : un escadron de farouches résistants, frais du jour, à la coque, descendus des maquis de Barbès, avaient surpris un feldwebel caché chez la jeune personne.

      

    Ils avaient – naturlicht ! – flingué le chleu. Rien à redire. Après quoi ils avaient férocement tatané la gamine avant de la tirer par les cheveux jusqu’à la petite place où ils l’avaient attachée au tronc d’un acacia.

      

    C’est là qu’ils l’avaient tuée. Oh ! Pas méchant. Plutôt voyez-vous à la rigolade, comme on dégringole des boîtes de conserve à la foire, à ceci près : au lieu des boules de son, ils balançaient des pavés.

     

    Quand ils l’ont détachée, elle était morte depuis longtemps déjà aux dires des gens. Après l’avoir balancée sur le tas de cailloux, ils avaient pissé dessus puis s’en étaient allés par les rues pavoisées, sous les ampoules multicolores festonnant les terrasses où s’agitaient des petits drapeaux et où les accordéons apprivoisaient les airs nouveaux de Glen Miller.

      

    C’était le début de la fête. Je l’avais imaginée un peu autrement.

      

    Après ça je suis rentré chez moi, pour suivre à la T.S.F la suite du feuilleton. Ainsi, devais-je apprendre, entre autres choses gaies, que les forces françaises de l’intérieur avaient à elles seules mis l’armée allemande en déroute.

     

    Le Général De Gaulle devait, par la suite, accréditer ce fait d’armes. On ne l’en remerciera jamais assez. La France venait de passer de la défaite à la victoire, sans passer par la guerre. C’était génial.

     

     

     

    Michel AUDIARD, in Le Figaro-Magazine, 21 Juillet 1984, reproduit

    en 2009 dans le numéro nº13 du Petit Célinien

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    L’Épuration et les femmes en Dordogne (1944-1951)
    Par Jacky Tronel


    Volonté de justice ou fureur de punir ?   La répression des femmes déclarées coupables d’avoir collaboré avec l’ennemi pendant l’Occupation s’est exprimée sous deux formes : « sauvage » d’abord, légale ensuite.



     



    « C’est fête ces jours - ci pour le badaud peuple de Périgueux. Et défilés ! Et fanfares ! On reprend le goût de sourire après avoir tant serré les poings et froncé le sourcil. Les Périgourdins furent bien ébaubis l’autre soir au passage d’un singulier cortège.
      
    Un être étrange, bizarrement humain, menait la danse.   
      
    À force d’écarquiller les yeux, on reconnut des formes féminines et sous un crâne en boule d’ivoire marqué de peinture infamante, des yeux torves, une bouche baveuse : la hideur d’un déchet. C’est la femme aux bicots ! ’ expliquaient les gosses au passage. Il n’y avait pas un regard de pitié pour elle ( … )   
      
    Et l’on pouvait songer aux défilés semblables qu’avaient vus les mêmes rues au Moyen - âge à une époque ardente et bonne enfant où l’on promenait les adultères nues, autour de la ville, juchées à rebours sur un âne. »
     

       Ces quelques lignes, relevées dans l’édition du 7 - 8 septembre 1944 des Voies nouvelles, campent assez bien le sujet. Le récit de cet événement, reproduit à l’envi tout au long des jours qui suivent la Libération, pose à la fois la question de la « justification » de l’Épuration et celle de la représentation de la « femme épurée ».   
      
    Tant dans l’inconscient collectif que dans l’imagerie populaire, la femme tondue incarne le symbole de l’Épuration. Son crâne rasé révèle, au regard de tous, la matérialité du châtiment épuratoire.  
     
     Quant à la nature des faits qui lui sont reprochés, ils dépassent largement le cadre de la « collaboration horizontale », à savoir l’inconduite sexuelle, réelle ou supposée, avec les Allemands ou leurs supplétifs.

    Précisons qu’il n’est pas question ici de réduire l’histoire de l’Épuration et des femmes en Dordogne aux tondues de Périgueux, de Bergerac et d’ailleurs. Le but de cette contribution n’est pas non plus d’entrer dans une logique de victimisation, ni d’engager une quelconque tentative de réhabilitation.  
     
     Il s’agit simplement de procéder à la lecture d’un certain nombre de faits et de témoignages, analysés dans leur contexte, en vue de contribuer à éclairer une page obscure de notre histoire.



    Les principaux lieux de détention des prisonniers frappés d’épuration se trouvent,
      
    pour la partie Nord du département, à Périgueux :
      
    caserne du 35e RAD (Régiment d’artillerie divisionnaire) et maison d’arrêt Beleyme ;
      
    pour la partie Sud, à Mauzac : camps pénitentiaires (Nord et Sud), situés à une trentaine de kilomètres à l’Est de Bergerac.

       Le 18 mai 1946, ces derniers enregistrent un pic de 1 740 détenus. Du 1er novembre 1940 au 2 mai 1945, le camp Nord a le statut de prison militaire, puis de centre pénitentiaire, après cette date. 

    Du 22 octobre 1947 au 15 février 1951, le camp Sud fonctionne en tant que prison pour femmes.
      
    Aujourd’hui, c’est un centre de détention pour détenus en fin de peine.

    À la prison militaire de Mauzac Le 6 juin 1944, l’annonce du débarquement allié en Normandie suscite l’enthousiasme dans la population et soulève, en Périgord, une formidable vague de ferveur patriotique.
      
    Le climat est à l’insurrection.  
     
     
     
     
     
     La « Quatrième République » est proclamée.
      
      
      
    Un « Comité français de libération » est mis en place.
      
    Le ralliement aux différentes forces de la Résistance, spontané pour les uns, calculé pour les autres, déclenche, dans tout le département, un certain nombre d’actions « épuratoires » et
    « libératrices », parmi lesquelles figure l’attaque du camp de Mauzac.

     
      
    Ce 7 juin 1944, sous la conduite de Léon Cerisier, alias Léontine, chef d’un maquis de l’AS, à Lalinde, une centaine de résistants se présentent à l’entrée de la prison ( camp Nord ). Ils obtiennent la libération de 42 « politiques ».
     
     
      
    Cerisier prend le contrôle de la prison et nomme le surveillant chef Joseph Chaussat au poste de commandant.
     
     
     

       À partir du 9 juin, les maquis de la région conduisent au camp de Mauzac leurs prisonniers.
      
    Dans un rapport du 29 juin 1944 adressé au service de la Justice militaire à Vichy, l’adjudant Antoine Chiaramonti, commandant la prison militaire, signale l’incarcération
    « par ordre du Maquis ( … ) de 229 détenus dont 48 femmes ».   
      
      
    De fait, du 9 au 21 juin 1944, période au cours de laquelle la prison militaire de Mauzac est sous contrôle de la Résistance,
     
      
    on relève la présence de 225 internés . 22,7 % sont des femmes, parmi lesquelles huit cultivatrices, trois bonnes, trois serveuses, deux couturières, deux infirmières, deux ménagères, une danseuse, une institutrice, une employée de bureau, une hôtelière, une commerçante, une vendeuse, une masseuse et une « rentière ».
      
      Quatorze d’entre elles sont déclarées « sans profession », et pour neuf autres, la profession n’est pas précisée.  
      
     
    L’arrestation et l’incarcération d’un certain nombre de femmes sont liées à celle d’un proche – conjoint, fils ou frère – parce qu’« adhérent à un organisme de collaboration ».  
     
     Parmi les principaux, citons la Légion française des combattants (LFC), le Service d’ordre légionnaire (SOL), la Légion des volontaires français contre le bolchevisme (LVF), le Parti populaire français (PPF) et la Milice.


    Sur la douzaine de baraquements que compte la prison, deux sont consacrés aux femmes.
      
    Le 9 juin 1944, Michel Danner, président cantonal de la LFC à Lalinde ( Dordogne ), est écroué à Mauzac avec son épouse.
      
    Il décrit ainsi les lieux :  
      
    « Ce camp est un vaste quadrilatère entouré de cinq rangs de barbelés et flanqué de miradors.   
      
    Des baraques, sans étage, et primitivement construites pour loger les ouvriers de la poudrerie en construction, sont séparées les unes des autres par d’autres barbelés. Les fenêtres sont tendues de barbelés, partout on ne voit que cela. Là-dessus une tristesse morne, une humidité pénétrante … »



    Femmes tondues sur les marches du palais de justice de Bergerac, septembre 1944. ยฉ Photo Bondier 
     







    Les tontes : manifestations spontanées ou bien mises en scène ?


    La question est maintenant de savoir si les manifestations de liesse populaire et les cérémonies de tontes publiques sont, ou non, le fruit d’un mouvement populaire spontané…

    En dépit de quelques débordements dont on ne peut nier qu’ils sont le fait d’actions populaires spontanées, l’Épuration a, le plus souvent, été mise en place, pour ne pas dire mise en scène. C’est le cas des tontes de « collaboratrices » qui ont lieu à Bergerac sur les marches du palais de Justice.
      
    Le choix du lieu n’est pas innocent.   
      
    Sous le porche d’un tribunal où justice est rendue, des femmes soupçonnées de s’être
    « compromises avec les Boches » sont châtiées, publiquement.
      
    Les marches les plus hautes font office de podium, et du haut de cette estrade improvisée, officient les « coiffeurs » en blouse blanche. Ils président à une cérémonie qualifiée par l’historien Alain Brossat de « carnaval moche ».  
     
     Le rituel public de la tonte, écrit-il, est « une fête, un jeu, une exhibition, une cérémonie. […]
      
      Pour souligner qu’il s’agit d’un jeu, d’un ‘théâtre’, le marquage, ébauche de déguisement, joue un rôle décisif dans la cérémonie des tontes ; le ‘degré zéro’ du travestissement,
      
    c’est la croix gammée que l’on trace à la peinture, au goudron, que l’on ‘sculpte’ avec des ciseaux sur le crâne, que l’on dessine sur le visage, les seins, les fesses, voire le corps entier de la tondue. »

     
    Les partis politiques encouragent la chasse aux collabos, généralement suivie du spectacle des tontes publiques. Le mercredi 29 août, 3 000 personnes assistent à un rassemblement qualifié de « premier meeting populaire du Front National », place de la République, à Bergerac.
      
    Les orateurs se succèdent et en clôture s’exprime le représentant des FTPF, Yves Péron, alias Caillou, ancien prisonnier politique interné à Gurs, Mauzac et Nontron, futur député communiste de la Dordogne.  
     
     Il demande que « justice soit faite contre les traîtres,
    les tortionnaires de nos patriotes emprisonnés » et déclare :
      
    « Tous les complices des boches doivent être châtiés et le châtiment c’est la mort ».   L’assistance, enthousiaste, « applaudit frénétiquement ». Dans cette même édition du 2 septembre 1944, sous le titre « Sus aux traîtres ! », le journal Bergerac Libre rapporte qu’en Bergeracois les 155 premières arrestations sont loin d’être définitives :  
     
     « Les enquêtes et interrogatoires se poursuivent activement. Les femmes ayant eu des relations avec les boches ont été tondues.
      
    D’autres suivront bientôt.   
      
    Avec le concours de la population, nous espérons arriver bientôt à assainir notre ville. » Le journal communiste reconnaît que « des omissions ou des erreurs ont pu être commises » lors de la confection des listes de suspects et la constitution des dossiers.   
      
    C’est donc « pour remédier aux unes et aux autres que nous prions le public de nous faire connaître le nom des personnes ayant eu une attitude antifrançaise, appuyé de faits précis ».
      
      
    L’appel à délation est on ne peut plus clair.


    Le journal Les Voies Nouvelles du 7-8 septembre 1944 reconnaît bien « quelques excès », mais qu’il ne faut « ni grossir, ni exagérer », s’empresse d’ajouter l’auteur de l’article.
      
    « Oui, les réactions du peuple sont rudes, mais saines.
      
    Oui, des gens ont été hués et malmenés dans les rues, mais c’étaient des traîtres.     
      
    Oui, il a pu y avoir des erreurs, mais elles ont déjà été réparées. N’oublions pas que les excès possibles ont été la réaction spontanée et au grand jour d’un peuple trop longtemps opprimé, affamé, trahi.
      
    Ses débordements ont des excuses. Voyons-y un sursaut de vitalité et de justice, un réveil de patriotisme. » !  

    La presse gaulliste semble, quant à elle, plus mesurée, à l’exemple de l’hebdomadaire Combat républicain du 17 septembre 1944, qui, sous le titre « Justice et humanité », invite les magistrats à juger avec justice, sévérité mais humanité.  
     
     Il rappelle que « le moindre doute doit être favorable à l’accusé dont la défense doit être assurée comme il convient dans une République qui est la gloire du monde civilisé, la République des droits de l’homme et du citoyen. Ne vaut-il pas mieux absoudre un coupable que de fusiller un innocent ! » Les propos invitent à l’apaisement.     
      
    Excessivement rare dans le contexte d’une épuration que l’on peut encore qualifiée de « sauvage », ce discours décalé mérite d’être signalé.  
     


    Plus de soixante ans après, parler d’Épuration reste sensible…

    En conclusion, c’est l’historien Pierre Laborie
    qui résume le mieux l’esprit de cette recherche :
     


    « Loin de justifier ou de condamner,
    c’est d’abord de comprendre dont il s’agit ;
    c’est, avant de se risquer à dire pourquoi,
    chercher à savoir comment les choses
    se sont passées. »






     
     
     
     
     
     
     


     

     

     

     

     

     

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