Les témoins du 6 juin 1944 – civils ou soldats, enfants ou adultes – racontent des morceaux de leur vie, ce jour-là, sous les bombes.
En Normandie, ces temps-là, ces jours-là racontent les histoires de leur vie, qui, soudain, bascule. Sainte-Mère-Eglise :
Juliette et Georges sont les mariés du 6 juin 1944, les premiers mariés de la France libre. Bayeux :
Marcel, jeune résistant, déporté, s'évade des camps de la mort.
Le jour de ses 20 ans, il entre dans Berlin libéré. Caen, Saint-Lô, Avranches : à vélo, Fernand traverse les villes meurtries, à la recherche de ses parents disparus. Utah Beach : Jacques, le jeune pilote de chasse français engagé dans la Royal Air Force, vit le " jour le plus court " de toute l'histoire de la bataille de Normandie :
le matin du 6 juin, il disparaît en mer.
Depuis, une Anglaise va, chaque année, fleurir sa tombe sous-marine quelque part au large du Cotentin. Sourdeval :
le souterrain du vieux château Labiche protège des bombardements la colonie de vacances des enfants de Cherbourg.
Ils ont entre 2 et 14 ans. Mortain dans les galeries de l'ancienne mine de fer, huit cents civils vivent le cauchemar de la destruction ; parmi les réfugiés, deux enfants et leur grand-mère. Nous avons retrouvé tous ces témoins et beaucoup d'autres : ils se souviennent et racontent. Morceaux de leur vie, sous les bombes de 1944, ce jour-là en Normandie
Philippe Bertin a recueilli les témoignages de divers témoins qui ont vécu la guerre en Normandie, l’approche du Débarquement, et ses suites. Il les transmet avec » les mots du coeur « ‘ et tous émeuvent profondément.
Tout d’abord, Marie-Louise : » Un soir, tout près d’Utah Beach, calée dans son fauteuil d’où elle regardait fixement la mer et les vagues, Marie-Louise nous a raconté qu’en écoutant le vent, parfois trop violent du large, elle croyait soudain revivre ces terribles moments lorsqu’ elle assistait, terrorisée et impuissante, à la destruction de sa ville natale, Saint-Lô. Marie-Louise n’a rien oublié de ces temps-là : le soir, elle ne supporte plus les images de violence qu’elle entr’aperçoit dans la lucarne de son téléviseur, au journal de vingt heures. Ces morts, ces enfants meurtris par les bombes qu’on étale, sans pudeur, à la une des journaux lui rappellent trop de drames et de déchirures.
Le 6 juin 1944, à vingt heures quand, au-dessus de Saint-Lô, apparurent les premières forteresses volantes, Marie-Louise venait de fêter ses dix-sept ans : elle a vécu ce moment-là dans les ruines fumantes d’une ville qui allait, d’un seul coup, devenir martyre. La peur, la fuite sur les routes de campagne, l’exode de ferme en ferme : Marie-Louise, pour conjurer le sort et la peur, a tout écrit, sur un petit cahier d’écolier aux feuilles quadrillées « .
Il y eut un mot, parmi tant d’autres, pour décrire ce qu’était devenue Saint-Lô :
» rôtie « .
Marcel Fauvel, maintenant médecin de campagne retraité à Caen, tient à parler de son engagement dès ses quinze ans dans la Résistance à Caen.
Il a souffert quand son père, combattant de 1914-1918, est mort trop tôt des gaz et d’ épuisement, il s’est révolté quand il a vu les Allemands entrer dans sa ville, l’un d’eux occuper sa maison, et oser demander à sa mère un service qu’il aurait pu accomplir lui-même: »
Entre 1941 et 1943 , Marcel Fauvel et Claude Lemarchand, tous deux lycéens, vont agir dans l’ombre à la recherche de renseignements qu’ils communiquent aux membres du réseau Libé-Nord. »
Claude Lemarchand est arrêté le premier. alors qu’il transporte en plein Caen un chariot rempli d’armes. Il est torturé, jugé en Allemagne, et meurt en prison, atteint de tuberculose. Une plaque apposée sur un mur du lycée Malherbe de Caen, devenu Hôtel de Ville, rappelle le souvenir du jeune résistant de la première heure.
Marcel Fauve se savait traqué, mais n’eut jamais peur. Lui aussi fut arrêté par la Gestapo, le 17 février 1943, au cours d’une grande rafle organisée par les occupants. Il fut longuement torturé par un » Monsieur Hervé » puis transféré en Allemagne avec beaucoup d’autres dans des wagons fermés, sans eau ni nourriture, sous la chaleur torride. Beaucoup trouvèrent la mort. Au bout du voyage, c’était Büchenwald, puis le camp de Langeinstein, où les survivants creusaient à la main des tunnels. Il craint que, les échos du Débarquement se précisant, les SS ne les transforment en fosse commune, et il réussit à s’échapper avec deux compagnons. Ils parviennent à gagner le front russe. Le jour de ses vingt ans, le 24 avril 1945, il entre victorieux dans Berlin, avec « l’impression de vivre l’histoire, d’y participer pleinement « .
Ce qu’il garde de ces années : deux documents, le plan du camp de Langelstein, où l’architecte avait prévu un emplacement pour une potence, et une photographie prise quelques semaines plus tard devant le Lutétia à Paris,quand il échange une poignée de main avec le Général de Gaulle.
Connaissez-vous Mortain ? C’est une des plus belles régions de la Manche, qui en compte tant. Mortain – la poche de Mortain- subit aussi de terribles bombardements. Deux soeurs, Suzanne et Yvonne, onze et quatorze ans, avaient quitté Sotteville près de Rouen pour rejoindre leur grand mère dans le Sud de la Manche, où, supposent leurs parents, elles seraient davantage en sécurité. Etant donné l’ampleur des combats, le sous-préfet, M. Panzani, décide la réquisition de la mine de Cambremont, près de Neufborg, et son directeur organise son aménagement. A près de vingt mètres sous terre, une terre humide, friable, environ huit cents personnes y trouvèrent un abri. Cela dura plus de deux mois. Quand elles en sortent, elles voient des ruines et des cadavres… elles trouvent des lettres adressées depuis l’Ohio à un soldat, Tommy, et elles les recueillent. Les lettres à Tommy sont publiées en fin de volume.
De ces histoires terribles, Philippe Bertin fait surgir une épopée presque romantique. (Elles m’émeuvent personnellement profondément, car je suis attachée à la terre manchoise, où j’ai vécu quelque temps, certes en « horsain » ! et entendu des souvenirs » d’après le Débarquement « , le soir à la veillée).
Au revers du livre, la quatrième de couverture, on peut découvrir d’autres noms, d’autres récits intenses.
jours poignantes qui racontent ce que fut le D. Day, autant de portraits et de récits qui dessinent au fil des pages l'histoire extraordinaire de la bataille de Normandie vue par celles et ceux qui l'ont vécue parce qu'ils en ont été les témoins ou/et les acteurs.
Philippe Bertin collection > Poche Histoire Parution mai 2014 • broché •
- Sainte-Mère-Église :
Marcel, 15 ans, est enrôlé par l'Armée américaine pour enterrer, dans le champ d'à côté, les premiers GI'S tombés au combat aux premières heures de la Bataille de Normandie.
- Marais du Cotentin :
alors qu'au dehors, les combats font rage, Roger soigne GI's américains et soldats allemands sans distinction à l'abri d'une minuscule église transformée en endroit de paix le temps des combats.
Philippe Bertin, ancien journaliste, puis directeur de la Communication du Département de la Manche, est le Directeur de l'institution régionale « Caen Expo Congrès ».
Il a publié de nombreux ouvrages aux Editions Ouest-France dont Histoires extraordinaires du jour le plus long, 14-18, 1a Grande Guerre : armes, uniformes, matériels et D-Day Normandie : armes, uniformes, matériels.
LE SAVIEZ-VOUS
Né dans un champ et sous les bombes !
C'est le destin incroyable du jeune Harry Decaen dont la naissance eut lieu au tout début du mois 1944 à Vernix, tout près de Mortain, le sud du département de la Manche.
Les forces américaines y avaient installé le plus imposant hôpital militaire de toute la bataille de Normandie, trois mille lits pour y accueillir sous les toiles kaki des milliers et de milliers de soldats victimes des combats en plein bombardement de la région de Mortain Le 91th Evacuation Hospital fonctionna sur place du 4 au 28 août.
La marraine du jeune Harry fut la directrice elle même de l'hôpital provisoire,
Marie Couderc. Harry Decaen a vécu toute sa vie près du champ où il est né.
Couverture réalisée par nos soins