• Témoignage et l' histoire d' un miraculeux survivant; âgé de 15 ans.

     

     

      

    Témoignage et l' histoire d' un miraculeux survivant

      
    Arrêté en 1942, un jeune de 15 ans témoigne
    (Témoignage d'Herman Idelovici)
    L'ARRESTATION / L'ATLAS
      

    « Nous sommes en 1942, le 24 septembre, on frappe à la porte de notre appartement où nous habitons mon père, ma mère, mes soeurs et moi et dans l'encadrement de la porte, se présentent deux agents de police, de la police française, hélas. Mon père ouvre la porte et les deux agents présentent des fiches individuelles.
      
    Ils présentent quatre fiches individuelles aux noms de mon père, de ma mère, de ma soeur aînée et de moi-même. En ce qui concernait ma plus jeune soeur, née en France, les policiers n'avaient pas sa fiche. Mon père a fait remarquer que la fiche de ma jeune soeur n'existait pas et disant, voulant dire par là : et bien, elle est française, elle n'est pas concernée.
      
      
    Les agents de police, après un temps de réflexion très court ont répondu :
      
      
      
    “Si, si, elle est là, nous l'emmenons avec vous, vous verrez plus loin”. Ils ont même dit : “Vous vous débrouillerez plus loin”, comme s'il y avait quelque chose encore qui puisse être débrouillé. Et donc mon père... mon père nous avait fait préparer “a tout hasard” (entre guillemets), une petite valise d'effets personnels pour chacun d'entre nous.
      
      
      
    Nous prenons donc cette petite valise, puisqu'on nous avait demandé de les suivre et au moment où je prends cette petite valise, je me dirige vers mon cartable, vers ma serviette de lycéen, j'en sors un atlas, cet Atlas Pratique, et alors que personne ne me regarde, personne ne sait ce que je fais, les autres personnes sont occupées à autre chose, je l'ouvre à la page, à la double page qui contenait la carte de l'Allemagne, entre la page 20 et la page 25
      
      
    - il y avait donc deux double pages
      
      
    - j'arrache rapidement la carte de l'Allemagne, sans toucher au reste, je plie cette carte, cette double page en quatre et je la range dans ma veste.
      
      
    Expliquer pourquoi, à ce moment là, cette idée m'a traversé la tête, d'enlever la carte de l'Allemagne comme si, comme si je partais en voyage quelque part, comme on se munit d'une carte pour savoir où l'on va et par quel itinéraire on va passer, je ne saurais pas dire exactement, toujours est-il que j'avais quand même conscience que nous partions quelque part, vraisemblablement en Allemagne, et j'avais cette habitude de toujours essayer de me situer géographiquement et dans le temps et je voulais savoir par où on allait passer et éventuellement où nous arriverions.
      
      
      
    Cette carte, pliée en quatre et même plus tard en huit, j'ai réussi à la dissimuler pendant près de trois mois, très déchirée, très écornée à la fin, personne ne savait autour de moi, même pas mon père avec qui j'avais réussi à rester quelque temps, personne savait que j'avais ce morceau de papier que j'avais réussi à dissimuler à travers de nombreuses fouilles.
      
      
      
    Et puis un jour, par hasard, mon père voit ce papier dans mes mains, je ne sais pas pourquoi, j'ai voulu le regarder.
      
      
    Il me dit : “qu' est-ce que c'est que ça”, effrayé. “Tu vas détruire ça immédiatement”, parce que... qu'un déporté soit porteur d'une carte de l'Allemagne dans sa poche, c'était suffisamment grave pour me faire exécuter immédiatement.
      
    J'ai donc perdu cette carte... Mais, je reviens un instant en arrière, l'atlas, lui, il était resté dans l'appartement que nous avions quitté.
     
     
      
    Cet appartement, pour lequel mes parents avaient remis un trousseau de clefs à nos voisins de palier, de façon à ce qu'ils puissent, si quelque chose nous arrivait, essayer de sauver, de mettre à l'abri le maximum de ce qui pouvait se trouver dans l'appartement, le maximum utile.
      
      
      
    Cet appartement, effectivement, dès le lendemain matin de notre arrestation, donc le 25 septembre à 6 heures du matin il a été vidé.
      
    Un camion attendait au bas de l'immeuble et il a été vidé par les autorités allemandes, françaises, etc... Mais, entre temps, dans la nuit,(...) ma voisine est, en catimini, est entrée dans l'appartement et comme ça, à moitié dans le noir, a sorti les affaires qui lui tombaient sous la main dont, dont mon cartable de lycéen avec cet atlas que j'avais reposé sur mon cartable et c'est donc ainsi qu'en 1945 lorsque j'ai été rapatrié, fin mai, ma toute première visite a été évidemment pour l'immeuble que j'avais habité avec mes parents.
      
      
    C'était une certaine manière de fermer la boucle, “cet intermède” (entre guillemets) de trois années. Et puis, en parlant avec ma voisine, heureuse de me revoir évidemment, elle me dit : “Tiens Herman, j'ai des choses, des choses à vous rendre”.
      
    Je lui dis :
      
    “Vous avez des choses à me rendre ?”
      
    Et elle me sort un pardessus de mon père, enfin ce qu'elle avait pu vraiment attraper, attraper presque à la volée et en cachette, parce qu'elle a eu peur et elle me remet entre les mains cet atlas que j'ai été absolument étonné, étonné de revoir, alors que si il y a une chose à laquelle je n'avais pas pensé, c'était vraiment cet atlas. [...]
      
      
    LE VOYAGE EN TRAIN/ L'ARRIVEE
      
    Lorsque nous sommes sortis de notre immeuble, je me souviens que nous avons remonté à pied, encadrés par ces deux agents de police, nous avons remonté le boulevard de la Gare, en direction de la place d'Italie, nous sommes passés devant des commerçants et je me souviens bien, nous sommes passés devant la boulangerie, la boulangère était sur le pas de sa porte, elle nous a regardés et nos regards se sont croisés, je ne sais pas, je ne sais pas ce que cette femme a pu penser, ce que d'autres ont pu penser.
      
    Nous avons dépassé la rue Nationale, nous sommes arrivés au commissariat de police du passage Ricaut et là, mon père avait parmi ses clients, mon père était un artisan bijoutier-horloger, il avait parmi ses clients le commissaire de police et ce commissaire lui avait dit :
      
      
    “Monsieur David, (il l'appelait en général Monsieur David) si un jour, j'apprends quelque chose, ne vous inquiétez pas, je vous fait prévenir tout de suite”. Mon père aussitôt s'inquiète de savoir si ce commissaire était de service.
      
      
    “Ah non, il n'est pas de service aujourd'hui”.
      
      
    Mon père a eu beau supplier, ma mère a eu beau supplier, les inspecteurs qui étaient là :
      
      
      
    “Ah, ben, écoutez, vous vous débrouillerez plus loin”.
      
      
      
      
    Donc, après beaucoup de difficultés, on nous emmène avec les fameux autobus de sinistre mémoire, qu'on appelait les T N4 avec des plates-formes extérieures, on nous conduit au camp de Drancy qui devenait le grand camp de regroupement en vue des déportations, en direction de l'Est.
      
    Dans ce camp de Drancy, nous sommes arrivés vers 12 h 30 / 1h, on a commencé par nous dépouiller de tout ce que nous avions sur nous, en fait d'alliances, de bagues, de montres, de menue monnaie dans les poches.
      
      
    C'était d'ailleurs des agents de la milice, donc des Français, qui nous ont vidés complètement, nous ont dépouillés et puis on nous a fait monter dans un des blocs. Nous n'y sommes restés que quelques heures dans ce camp de Drancy puisque dès le lendemain, à cinq heures du matin, il y a eu un appel de fait dans la cour centrale et le convoi s'est préparé pour être conduit à la gare du Bourget-Drancy, qui servait de gare d'embarquement en direction de l'Est.
      
      
      
    Dans ces wagons de marchandises devenus célèbres depuis et dont on a montré pas mal de photos, wagons de marchandises qui étaient prévus pour, je crois, quatorze chevaux si je ne dis pas de bêtises, on a entassé soixante hommes, soixante personnes, hommes, femmes, enfants, vieillards, malades, bébés, nourrissons, y' avait des nourrissons dans mon wagon.
      
      
      
      
    On nous a fait monter, les portes ont été cadenassées, l'aération ne se faisait qu'à travers de petits vasistas en hauteur, c'était l'aération pour les chevaux, bien entendu. Il y avait un bac vide, un genre de tonneau vide pour les besoins intimes et on nous a donné à chacun un pain, un morceau de saucisson et un morceau de margarine.
      
    Je dois vous dire que l'atmosphère qui régnait dans ce wagon, qui a commencé de régner depuis le 25 au matin - le train a quitté la gare du Bourget Drancy à 8 h 55 , je me souviens encore de l'heure, l'atmosphère qui a régné jusqu'au 28 à midi, c'est quelque chose qu'il est très difficile de décrire, des cris, cris des femmes, cris des malades et des nourrissons, la soif, fin septembre il faisait encore relativement chaud, la soif, l'ignorance, l'inquiétude, évidemment personne n'imaginait où nous allions, personne n'imaginait non plus ce que nous allions faire, personne n'imaginait non plus ce qu'on allait faire de nous.
      
      
      
    De temps en temps, je me souviens, la nuit surtout,
      
      
    je ne sais pas pourquoi, la moitié des gens ne dormait pas, je me suis haussé sur la pointe des pieds et j'ai, j'ai réussi à lire par les vasistas, de nuit, certains noms de gares que nous traversions à ce moment là.
      
      
    J'ai vu d'ailleurs, Strassburg qui était devenu le nom de Strasbourg la nouvelle appellation, j'ai vu Fulda, j'ai vu Erfurt , j'ai vu Weimar.
      
    Des noms que je ne connaissais qu'à travers mes cours de géographie et, curieusement, à un certain moment j'ai mis la main à la poche pour savoir si j'avais toujours la carte ; j'pouvais pas la déplier, il faisait noir, c'était la nuit mais j'ai cherché quelque chose comme si c'était pour me, me dire : “Bon ça va, la carte est là, je sais où je vais”.
      
    C'était, c'était, grosso modo, c'était quelque chose comme ça. Avec le, avec le recul, je pense que c'était vraiment comme ça que je peux l'interpréter. Et puis, le 28 en fin de matinée, nous sommes arrivés en Haute Silésie, Oberschlesien en allemand dans cette gare qu'on appelle Kosel.
      
      
    Depuis c'est territoire polonais.
      
      
    Et lorsque les wagons se sont arrêtés dans un bruit de ferraille, les wagons s'entrechoquant au moment du freinage, dans un bruit de ferraille, les SS. ont commencé à hurler sur le quai, curieusement, les premières phrases que j'ai entendues en allemand, c'était, c'était des hurlements, des gueulements, des gueulements .
      
      
    Alors n'ayant pas fait d'allemand, j'y comprenais strictement rien.
      
      
      
    Les wagons ont commencé d'être ouverts à grand fracas et ils ont passé l'inspection, wagon par wagon pour voir s'il y avait des morts, s'il restait encore des vivants.
      
      
    Beaucoup de gens étaient morts, d'autres étaient devenus fous.

      
      
    LA SEPARATION/ LES DERNIERES IMAGES/ LES DERNIERS REGARDS

    Passée cette première visite, les hurlements des SS., gueulent devant chaque wagon, en allemand évidemment, que tous les hommes de 18 à 55 ans descendent immédiatement sur le quai. Mon père, comme tous les hommes de sa tranche d'âge descend sur le quai.
      
    Mon père a, à l'époque, 43 ans, il descend sur le quai et se met, se regroupe avec les quelques dizaines d'autres, une petite centaine qui s'y trouvait déjà. Quelques minutes se passent, je reste donc dans le wagon, puisque j'avais 15 ans, je reste donc avec ma mère et mes soeurs.
      
      
      
      
    Quelques minutes se passent et on entend à nouveau les portes qui claquent, de wagon en wagon. Les SS. referment les portes et les recadenassent.
      
      
      
    Au moment où ils arrivent devant mon wagon, les yeux du SS. se portent sur moi et il commence à m'apostropher en allemand, en tout cas, je ne savais pas que c'était sur moi mais d'après mon père qui m'avait fait signe de loin, ses yeux se portent sur moi, il commence à m'insulter en allemand de tous les noms que je ne comprenais d'ailleurs pas, voulant dire par là que j'étais en train de resquiller, que j'étais pas descendu, que je n'avais pas obéi à son ordre.
      
      
    Alors, je suis un peu interloqué, je ne savais pas d'ailleurs que c'était moi qui était concerné par sa harangue et mon père de loin me fait signe “descend, c'est de toi qu'il parle, ne discute pas”.
      
      
      
    Donc, je descends, je, je ne me souviens pas si j'ai, si j'ai pu dire au revoir à ma mère, à mes soeurs, je crois que dans ces moments- là on ne dit rien, je suis donc descendu avec le menu bagage qui me restait encore dans les mains et je rejoins mon père sur le quai. A ce moment- là, les quelques uns que nous étions sur le quai, peut-être une petite centaine, nous regardons le train qui s'ébranle dans un nouveau vacarme de ferraille et puis , je, je me souviens que j'ai regardé à ce soupirail où ma mère se trouvait dans ce wagon.
      
      
      
      
    Elle n'a pas pu se hausser à hauteur, elle était pas assez grande pour cela mais, j'ai vu d'autres visages et, et vraiment, je crois que c'était surtout le, un sentiment de crainte, d'inquiétude, d'ignorance.
      
      
    Je, je commençais d'être plongé dans un monde qui n'était pas le mien mais, qui n'avait rien de logique à mes yeux, qui n'avait rien de ressemblant avec ce qui avait été ma vie pendant les quinze années auparavant.
      
      
    Lorsque le train est parti, quelques minutes seulement, on nous a embarqué sur des camions, des camions ouverts pour nous conduire vers un premier camp qui s'appelait le camp de Ottmuth, qui était un camp de triage dans lequel nous sommes restés deux petites semaines. La vie concentrationnaire commençait pour moi. [...] »



    Herman Idelovici,
     

    Un automne 1942, script complet de la cassette vidéo,
    CRDP de l'Académie de Nice
     

    Herman Idelovici sera le seul survivant de sa famille.
      
      
    Sa mère et ses soeurs seront gazées à Auschwitz.
      
      
    Son père l'accompagnera un long moment dans les camps successifs, l'aidant et lui soutenant le moral, mais sera finalement sélectionné pour la mort en 1945.

     
      
    La vie des enfants dans les camps
      

    Qu'est-ce que vous faisiez, vous, les enfants à Auschwitz ?
      
    Vous jouiez ?

    « Je souffrais davantage de la soif que de la faim. Tant qu'on n'a jamais vraiment et régulièrement souffert de la soif, on a plus de pitié pour ceux qui ont faim. Mais il suffit de songer au temps qui peut s'écouler avant qu'un homme meure de faim et au contraire à la vitesse avec laquelle on meurt de soif. On peut jeûner des semaines, et même des mois, et subsister quand même, alors qu'on meurt de soif en l'espace de quelques jours. Et la soif est aussi plus torturante que la faim.
      
      
    A Birkenau, la nourriture, cette soupe distribuée tous les jours, devait être très salée, car j'avais toujours soif, surtout pendant les longues heures chaudes de l'appel sous le soleil brûlant. « Qu'est-ce que vous faisiez, vous, les enfants, à Auschwitz ? » m'a demandé quelqu'un récemment. « Vous jouiez ? » Jouer ! On était à l'appel. A Birkenau, j'ai été à l'appel, j'ai eu soif et peur de la mort. C'était tout, et rien de plus. »
      
      
    Ruth Klüger,
    Refus de témoigner Viviane Hamy éditrice, 1997.
     


    Stefan-Jerzy Zweig, dit « Juschu » est né le 28 janvier 1941 dans une famille
    juive de Cracovie.
      
      
    Fin 1941 sa famille est parquée dans le ghetto de Cracovie
    puis déportée dans unKommando du camp de Plaszow et dans d'autres camps
    avant d'arriver à Buchenwald, sa mère est envoyée dans un Kommando de
    femmes, Juschu et son père sont immatriculés à Buchenwald le 5 août 1944.
      
      
      
      
    Le
    comité clandestin prend la décision de cacher Juschu, avec l'accord de son
    père, dans un bloc différent [...]. La solidarité des détenus sauva la vie de
    l'enfant, photographié ici à la libération du camp entre deux détenus au
    milieu des cadavres.
     

    Extrait du livre de Miriam Rouveyre, Enfants de Buchenwald, Paris, éditions Julliard, 1995. pp. 83,93.


     

     

     

     

     

     

     

     

     

    « La chanson française sous l'Occupation Les MAQUIS, les MAQUISARDS »
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  • Commentaires

    1
    I20
    Dimanche 15 Novembre 2015 à 17:01

    je trouve le film "L'enfant de Buchenwald" très touchant et poignant a la fois,beaucoup de personne nous raconte des histoires sur la guerre comment sa c'est passé,le pourquoi du comment,c'est pour sa que nos prof d'histoire son la,mais se film est représenter par une histoire vrai,même si ils sont dans des camps de concentration,habillaient pareil,nourrie faiblement,il garde de l’humanité,il trouve un enfant et tous solidaires entre eux ils décident de le garder.

    Je ne dis pas que se que nous disent  les profs sois faux,bien au contraire mais pour la plus part ne sont pas nés à la guerre,donc quand ils nous racontent des choses il y a forcement des oublies,les personnes de la guerre on eux fait une autobiographe d'eut même,ou alors simplement écrit ce qu'il c'est passé le jour le la guerre,j'ai toujours trouvais sa intéressent de lire des lettres de personnes qui ont vécu la guerre,ma grand-mère est âgé de 86 ans elle a connue la guerre,mais je n'os jamais lui poser des questions même si nos prof nous le demande,j'ai peur que de mauvais souvenir lui reviennent et sa je ne veux pas.

     

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